L’histoire des éléphants sauvages d’Afrique est une véritable saga. Mais, menacés par les chasseurs d’ivoire, ces superbes mammifères qui existent depuis des millénaires doivent modifier des habitudes ancestrales et miser sur leurs capacités cérébrales pour survivre.
Il y a urgence. Victimes de braconnage, pratiqué dans toute l’Afrique, plus de 100 000 éléphants ont été tués au Mozambique, en Tanzanie et dans le bassin du fleuve Congo depuis 2010. Aujourd’hui, à cause du commerce de l’ivoire, il en meurt un, en moyenne, toutes les quinze minutes. Richard Obanda, gardien dans une réserve naturelle, exprime sa tristesse devant un tel massacre : « Abattre un éléphant de 7 tonnes pour faire un bracelet ? C’est surréaliste. J’ai vu des hommes mourir pour protéger des animaux. » Leurs territoires eux-mêmes se rétrécissent, modifiés en raison de la présence de l’homme. Acculés, les mammifères n’ont nulle part où se cacher et doivent, pour survivre, apprendre à s’adapter sans cesse. En observant leur comportement et leurs déplacements, des experts tentent de percer le mystère d’un cerveau bien fait.
Des créatures à l'intelligence très subtile
Cofondateur de l’ONG Éléphants sans frontières, Mike Chase s’est associé à des scientifiques pour survoler l’Afrique, surveiller les mouvements des mammifères et les recenser. Depuis plusieurs années, ils cherchent aussi à mieux cerner leurs capacités cérébrales, comme c’est le cas pour le majestueux Satao, un spécimen particulièrement intelligent. En effet, lorsque l’homme s’approche de lui, il se détourne et cache ses défenses dans un buisson. L’animal semble deviner l’intention de l’homme, qui veut le tuer pour son ivoire. Réceptif à son environnement, l’éléphant aurait, selon certains experts, une sorte de sixième sens ; il est en tout cas capable d’adapter son comportement en fonction du danger. Pouvant produire une onde sonore d’environ 120 décibels, il capte aussi des sons très éloignés par l’intermédiaire de vibrations dans le sol. « Ils entendent un autre éléphant appeler à dix kilomètres de là. Alors ils s’arrêtent et écoutent. On les voit écouter », explique Joyce Poole, qui s’intéresse à cet animal depuis plus de quarante ans. Ce mastodonte sait aussi identifier une menace en entendant des hommes parler. Au Kenya, des chercheurs ont ainsi fait écouter des enregistrements de voix humaines à un groupe d’éléphants. Lorsqu’il s’agit du dialecte du peuple Kamba, qui n’a pas d’animosité vis-à-vis d’eux, les éléphants ne réagissent pas. Mais quand ils perçoivent celui des Massaï, qui les attaquent, ils se rassemblent et prennent la fuite. Différents tests (miroir, haut-parleur) révèlent que ces animaux emblématiques coopèrent, se transmettent des informations et qu’ils auraient une conscience.
Lutter pour la protection des troupeaux
Il faut donc sauvegarder assez d’espace naturel pour les éléphants et sécuriser des routes migratoires. Comprendre l’éléphant, ce n’est pas seulement préserver la nature, c’est aussi sauver l’humanité, car, comme le dit Joyce Poole : «Très souvent, on a l’impression que les éléphants ne font rien. Mais quand on les regarde de plus près, on s’aperçoit qu’ils sont en train de réfléchir, de méditer. On le voit à leurs oreilles, à leur regard, à leur trompe. On a presque l’impression de voir les rouages de leur cerveau… en train de fonctionner. » Et si l’homme se mettait enfin à les écouter…
Françoise Jallot
Documentaire
Durée 52 min
Auteurs-réalisateurs Emre Izat et Geoff Luck
Production Off The Fence et Vulcan Productions
Année 2016
À compter du 31 août, chaque mercredi à 20.45, le grand spectacle de la science s’invite en prime dans une nouvelle case, avec des documentaires dédiés aux dernières grandes découvertes du monde. Un pari ambitieux pour mettre à la portée de tous les incroyables aventures de la science, les mystères de l’archéologie ou du corps humain, la révolution des technologies, les grandes expériences scientifiques et l’exploration d’univers lointains.