La réalisatrice Marie Agostini a posé sa caméra dans l’unité d’alcoologie de l’hôpital de Valence pour s’attarder auprès de celles et ceux qui ont choisi de se défaire de leur dépendance à l’alcool. Après la diffusion du documentaire, Marina Carrère d’Encausse animera un débat de 50 minutes avec des invités.
En janvier 2009, Laurence Cottet, qui exerce un poste à responsabilités dans un grand groupe du BTP, s’effondre ivre morte lors d’une cérémonie des vœux, devant plusieurs centaines de collègues médusés. Après plus de dix ans d’alcoolisme intensif, c’est l’ivresse de trop. Son corps la lâche. Elle perd son emploi, s’arrête de boire et quitte Paris pour s’installer dans la Drôme. C’est là, à Valence, qu’elle passe un diplôme en addictologie et crée, à partir de son expérience personnelle, la méthode H3D — pour Honte, Humilité, Honnêteté et Désir de s’en sortir*.
« La bouteille ne dit jamais non »
Dans le groupe de parole qu’elle anime trois fois par semaine, tous les patients sont abstinents, depuis plus ou moins longtemps, et désireux de tourner la page. Une abstinence encore fragile, jamais acquise, car l’alcool est partout et « la bouteille ne dit jamais non ». Ils ont été, chacun à leur manière, sévèrement cabossés par la vie, mais sont encore debout, en phase de reconquête. Tous évoquent la lassitude, la honte, la piètre estime qu’ils ont d’eux-mêmes. Tous parlent de l’alcool comme d’un pansement posé sur des souffrances, d’une « béquille » qui les aura, au final, conduits à tout perdre — leur emploi, leur conjoint, la garde de leurs enfants.
Anticiper les zones de turbulences
Docteure à l’unité de soins en alcoologie au centre hospitalier de Valence, Christine Joly travaille main dans la main avec Laurence Cottet*. Elle aide chacun des patients à mieux se connaître pour mieux anticiper les zones de turbulences : « Un patient qui arrête de boire se retrouve face à sa vie comme face à un puzzle, avec des morceaux connus, d’autres inconnus. Nous essayons de retourner avec eux tous ces morceaux et de les assembler pour identifier les points de fragilité sur lesquels il va falloir être vigilant au quotidien. » Pour les uns, l’événement déclencheur sera la colère, pour d’autres, la frustration, pour d’autres encore, la déception, la tristesse, la culpabilité… « Une personne dépendante à l’alcool est une personne qui souffre, ajoute le Dr Joly. Cette souffrance, il faut la détecter, car si on ne la traite pas, il y aura automatiquement un retour au produit. »
Le documentaire de Marie Agostini choisit de ne rien masquer des difficultés du combat de ces hommes et ces femmes qui ont décidé de reprendre le contrôle de leur vie. Entre coups d’arrêt, rechutes et retour à l’abstinence, le chemin est long et accidenté : « Ça prend du temps mais, après une psychothérapie, plus de la moitié s’en sortent, c’est énorme… »
Jean-François Parouty
* Laurence Cottet a publié en 2015 le livre Non ! j'ai arrêté (Interéditions), sur le même sujet.
Documentaire
Durée 52 min
Auteure-réalisatrice Marie Agostini
Production Éléphant Doc, avec la participation du CNC et de France Télévisions
Année 2016
#LMEF