"Addicts" en ligne mercredi 27 octobre

Un fil rouge : la drogue - Une génération : les moins de 35 ans ​​​​​​​- Trois combats : décrocher - vendre - réprimer

De plus en plus d’adolescents et de jeunes adultes s’enfoncent dans une dépendance physique et psychique aux drogues (cannabis et/ou drogues de synthèse). Au réveil ou à la sortie des classes, en solitaire ou entre amis, ils fument, sniffent et avalent tout type de substances. Pour se fournir, ils font appel à des dealers du même âge. Ensemble, ils ont un objectif commun : échapper au contrôle policier. 

Addicts, c’est un triptyque sur la drogue.  
Sur le même principe que The Wire, la série documentaire s'intéresse à la drogue à travers la vision de ceux qui la vivent au quotidien : consommateurs, dealers et policiers (tous âgés de moins de 35 ans).
Plus qu’un documentaire sur l’addiction aux drogues, le premier épisode est consacré à l’adolescence et l’entrée dans le monde adulte. On y découvre le regard de jeunes personnes, d’une force rare, sur les drogues, mais aussi sur leur vie, l’amitié, l’amour, la famille et l’avenir. Parce qu’évidemment l’addiction ne vient pas de nulle part. C’est une affaire d’environnement et de contexte, de fragilité et de sensibilité, et parfois aussi de parcours cabossé. On y interroge leur quotidien, leurs questionnements, leurs doutes, leurs angoisses et les moments de solitude qu’ils n’ont pas encore appris à contourner ou apprivoiser.


Pitch des épisodes :
1. Addicts. Les consommateurs

Des centaines de milliers de jeunes se droguent et ils sont des milliers à souffrir d’une dépendance problématique. Cannabis, MDMA/ecstasy, poppers, cocaïne, LSD, « PTC » (pour « Pète Ton Crâne »), médicaments, crack et héroïne... En France, les drogues font une percée inédite chez les moins de 35 ans. Qu’est-ce qu’une addiction ? Pourquoi les drogues s’immiscent-elles si fréquemment dans la vie des jeunes Français ? Quelles drogues les attirent davantage ? Comment la dépendance s’installe-t-elle ? Pourquoi sommes-nous inégaux en la matière ? Comment en sortir ? Quel est le parcours de ceux qui sont parvenus à vaincre la dépendance ? Aux côtés de jeunes consommateurs, de leurs amis, de leurs amours et des médecins compétents pour les aider, Addicts explore le boom des drogues, en France, chez les moins de 35 ans. Si les milieux sociaux des jeunes consommateurs ne sont pas les mêmes, ils présentent tous une extra-sensibilité et des questionnements communs. Ce documentaire observe ainsi la construction de quatre jeunes adultes addicts, et la force déployée pour ne céder ni à la colère, ni à la rechute, ni au désespoir. En bref, Addicts, ce sont des portraits cash mais jamais trash de jeunes qui bataillent pour aller mieux.

2. Addicts. Les dealers
Dans les villes, les campagnes et les zones périurbaines françaises, on deale de plus en plus jeune des drogues de plus en plus dures. Mais que pensent les dealers eux-mêmes de cette explosion du trafic et des consommations ? Quel regard portent-ils sur leurs clients qui ont souvent leur âge ? Que disent-ils de la dépendance ? Ont-ils parfois le sentiment désagréable d’y contribuer ? Et eux, peuvent-ils peu à peu devenir dépendant au deal, à l’argent et à l’adrénaline  ? Quels sont les liens entre jeunes consommateurs et jeunes dealers ? Et, enfin, comment les pratiques ont-elles évolué (call center, « drive de cité », messageries cryptées, etc.) ? En filmant deux dealers (ainsi que l’épouse de l’un d’entre eux), au Havre et en Île-de-France, Addicts interroge d’abord leur rapport intime au trafic de stups. Puis le documentaire questionne leur analyse sur la marche du monde et sur les enjeux du trafic de stups dans les quartiers.

Objectif : leur laisser la parole, avec une liberté de ton unique afin de comprendre pourquoi, depuis des années, le trafic persiste et se déploie à vitesse grand V dans les milliers de quartiers dits défavorisés. Les dealers interrogés ont tous une raison qui, à leurs yeux, légitime leur action. Et, surtout, ils admettent que bien souvent on devient addict au deal. Ce deuxième épisode a pour ambition de cerner et humaniser les enjeux, capter les tensions du quotidien, fendre l’armure et appréhender l’addiction psychologique au trafic.
 

3. Addicts. Les policiers
Pour compléter le travail, il était essentiel de zoomer sur le quotidien, les appréhensions, les fonctions et les convictions des jeunes agents en charge de lutter contre le trafic de stupéfiants.  Parce qu’ils sont protégés par leur hiérarchie, on les connaît peu ou mal. Mais, comme les consommateurs et les dealers, ils souffrent d’un isolement et d’une forme de précarité certaine. Quels regards les jeunes policiers portent-ils sur leurs compagnons de vie, dealers et consommateurs ? Quelles sont les difficultés rencontrées par les équipages pour lutter contre les trafics de stupéfiants ? Pourquoi la lutte contre les drogues semble-t-elle si complexe et fragile ? Comment appréhendent-ils la professionnalisation des dealers et les nouveaux outils à leur disposition (messagerie cryptée, etc.) ? Le dernier épisode du triptyque Addicts interroge de jeunes policiers de la brigade spécialisée de terrain de Creil et un gendarme spécialisé à la Section de recherches de Montpellier. Avec un objectif : questionner la construction et le quotidien de ces policiers contraints de dealer avec « un travail sans fin ».


Note d’intention de la réalisatrice 

Addicts, c’est d’abord un plan serré sur la jeunesse française. Sur ce qu’elle a de plus fragile et vulnérable, de plus exalté et déraisonnable, de plus drôle et bancal parfois aussi. Addicts, c’est aussi une histoire de liberté et de remparts. Je pointe évidemment les tremblements et les fracas qui peuvent naître de la dépendance, mais je m’attache également à interroger ses limites. Parce que les freins sont là, dans le soin qui peut être apporté à ces jeunes. Jusqu’où peut-on se perdre ? Quels sont les chocs physiques et psychiques qui découlent de la dépendance ? Qui nous rattrape et comment ? Lorsque les parents sont absents, qui prend le relais ? Et enfin quelle est la place de la solitude et de l’ennui dans la dépendance ? Cette question clé est centrale car, souvent, l’addiction naît tout bêtement d’un sentiment de solitude tourmenté, d’une vulnérabilité à la solitude. 

En permettant à une caméra de suivre des consommateurs, des dealers et des policiers dans leur quotidien, je souhaite filmer certes l’addiction et la fragilité que la drogue génère, la douleur, les doutes, la honte, le rapport à l’argent, l’ennui, les inquiétudes, mais aussi et surtout les efforts quotidiens, les rêves, les réflexions, l’humour ravageur et l’espoir qui soulagent et neutralisent les angoisses. Parce que la plupart des jeunes personnages manient l’autodérision, il n’y aura aucune forme de misérabilisme. Leur humour et leur sensibilité donnent le ton et le rythme du documentaire. Il ne s’agit pas de nier ou d’édulcorer leurs souffrances, bien au contraire, il s’agit simplement de ne pas nous apitoyer sur leur sort et de fuir toute certitude et condescendance, pour mieux percevoir les causes substantielles de l’addiction et du trafic chez les jeunes.

Si les jeunes consommateurs sont addicts aux substances, les jeunes trafiquant admettent souvent qu’ils sont addicts au deal. Les jeunes policiers quant à eux sont addicts à leur métier et dépendent de la politique du chiffre, devenue essentielle dans ce domaine. Tous souffrent d’un isolement et d’une forme de précarité. Par cette série, j’ai souhaité mettre en avant les différents combats intra-générationnels liés à la drogue. Et que l’on s’attache à chacun des personnages, sans jugement. En clair, Addicts n’est pas un documentaire à charge sur la drogue ni un récit fataliste sur la dépendance. La série dresse simplement un état des lieux sensible du lien de certains jeunes Français à la drogue.

Dans chaque épisode, nous entrelaçons les portraits, tournés essentiellement entre Paris et le Havre. Le port du Havre étant le premier point d’entrée de la drogue en France, l’accès aux diverses substances pour les consommateurs comme pour les dealers y est assez évident. Il me semble donc que ça a du sens de se concentrer aussi sur cette ville, comme un écho, une antichambre de ce qui se joue en Île-de-France. Ces portraits, qui se chevauchent et se complètent, forment des mouvements. Les jeunes n’en sont pas tous au même stade, dans leur parcours addictologique, dans leur lien au trafic ou dans leur carrière au sein de la police nationale. Les paroles et les avancées des uns font souvent écho aux interrogations des autres. Bien souvent, leurs propos s’entrechoquent et se répondent. Un travail minutieux de montage permet de mettre en valeur ce regard intragénérationnel. 

Les trois épisodes s’articulent autour de trois ou quatre récits. En amont du tournage, j’ai souhaité réaliser de longs entretiens audio avec chacun des personnages, afin d’aborder avec profondeur leur parcours et leurs questionnements intimes. L’audio permet souvent de briser la distance. L’audio permet aussi de vaincre la timidité et l’autocensure. Avec ce travail préalable des propos puissants, vrais et évocateurs ont été obtenus. Ces récits préalablement enregistrés et montés ont ensuite été adjoints aux images. Ainsi, les jeunes, à travers leurs propos constituent leur propre voix off, vive et tendre, qui alimente le documentaire. Ces entretiens ont constitué un socle, une base solide et inébranlable pour le lancement du tournage. 

Pour filmer la relation complexe, ambiguë et quotidienne qui unit les jeunes à la drogue, il faut du temps, de l’empathie et une absence totale de jugement. Avec pudeur et franchise, ils ont pris la parole. Je les ai aidés et accompagnés pour qu’ils soient complètement à l’aise mais je n’apparais jamais dans le documentaire. Leur regard, leurs mots, leur quotidien et leur parcours suffisent à cerner les vices, les causes et les conséquences de l’addiction aux drogues.

La musique enfin, omniprésente dans la vie des jeunes protagonistes, a sa place. Elle rythme les séquences et sert d’intersection dans le  croisement des personnages. 

Aujourd’hui, à 34 ans, l’adolescence ne m’a jamais autant interpellée et touchée. C’est seulement maintenant, résolument et joyeusement ancrée dans l’âge adulte que je perçois la force, la puissance et la violence des doutes dans lesquels on se laisse innocemment tomber à l’adolescence. Et puis, un peu par hasard, j’ai été amenée à réaliser de nombreux reportages avec des ados ces trois dernières années. Leurs paroles franches, spontanées, drôles, audacieuses, inquiétantes, malignes et souvent pleines de bon sens m’ont chaque fois convaincue de l’intérêt de leur laisser la parole. Et souvent, lorsqu’on leur tend le micro, j’ai pu constater que la drogue revenait dans leurs débats et discussions. Avec sérieux ou dérision, et toujours un peu impressionnés, ils aiment en parler. Qu’on la fuie ou qu’on s’y plonge, la drogue est au centre de leur quotidien et c’est, je crois, ce qui m’interpelle.
 

Biographie de la réalisatrice

Olivia Müller est une journaliste française, reporter pour l’émission Les Pieds sur Terre sur France Culture. Auparavant productrice à Radio Nova, elle a par ailleurs collaboré à de nombreux titres de presse écrite (Les Inrockuptibles, Elle, Marie Claire...). Elle est aussi docteur en droit, spécialiste des politiques migratoires. Et se passionne pour les sujets qui questionnent l’intime.

Addicts

Une série documentaire
 en trois épisodes d’Olivia Müller

Production
Magnéto Presse

 

Une co-production
France Télévisions

 

 

 

ID de la video FTV Preview