
Double case politique du dimanche, « C politique » et « C polémique », ce sont plus de deux heures d’analyses, de reportages et de débats d’idées. Un rendez-vous hebdomadaire devenu essentiel pour comprendre les enjeux de l’élection présidentielle d’avril prochain. Et les téléspectateurs ne s’y trompent pas. Karim Rissouli et Bruce Toussaint nous expliquent le succès de ce magazine en deux parties. Entretiens.
ENTRETIEN AVEC KARIM RISSOULI
Quel bilan peut-on faire de cette première partie de saison ?
Karim Rissouli : Pour nous, le bilan est très positif. Tant en termes de qualité de ce qu’on met à l’antenne que d’audience. J’ai le sentiment que plus l’année avance, plus nos reportages sont de qualité : les coulisses — sujets qui suivent les dessous de la campagne électorale — et des enquêtes. Je pense qu’on a réussi à s’imposer dans le paysage comme une émission politique différente. Ce qui était notre volonté en début d’année.
Les audiences sont au rendez-vous, comment l’expliquez-vous ?
K. R. : L’émission traite de l’actualité politique de la semaine, sans homme politique en plateau. Ce qui est plutôt osé en année présidentielle, mais on l’assume totalement avec la chaîne et la production. On a ainsi des intellectuels qui viennent pour apporter leur point de vue et pour élever un peu le débat. Pas des invités qui vendent leurs éléments de langage ou leur programme politique. C’est une approche différente qui s’est manifestement révélée payante.
Vous avez une bande autour de vous qui a su tout de suite s’imposer. Pourquoi ça marche aussi bien entre vous ?
K. R. : Nous sommes cinq dans la bande. Camille Girerd, une reporter politique qui passe sa semaine à chercher de l’info sur le terrain. Thomas Snégaroff, lui, est spécialiste de l’histoire politique française et américaine ; il a un rôle essentiel qui permet de mettre en perspective l’actualité de 2017 avec ce qui s’est passé il y a trente ou quarante ans. Luc Hermann est notre enquêteur (patron de Première Ligne, producteur de Cash Investigation sur France 2) ; il joue le rôle de poil à gratter. Et puis il y a Maxime Darquier, un journaliste qui s’occupe du « fact checking », datas à l’appui. C’est une bande qui s’est imposée très vite car ils sont tous très complémentaires. C’est ça notre secret.
Vous diriez que cette campagne se démarque particulièrement des autres ?
K. R. : Elle est hors norme. Il n’y a pas eu de campagne électorale comme ça depuis le début de la Ve République. Autant d’incertitudes à deux mois d’une élection, c’est sans précédent. On a le sentiment qu’on arrive au bout d’un système classique d’alternance gauche-droite. Là, le schéma est tout sauf classique : il y a un FN qui fait entre 25 et 30 %, un Emmanuel Macron qui vient du centre gauche, un candidat sortant qui ne se représente pas, un candidat de gauche qui est un frondeur, et Jean-Luc Mélenchon qui, lui aussi, incarne quelque chose de nouveau… Je pense qu’il n’y a jamais eu autant de nouveauté dans une campagne électorale. En tant que journaliste politique, c’est passionnant à disséquer.
ENTRETIEN AVEC BRUCE TOUSSAINT
Quel bilan pouvez-vous faire de cette première partie de saison aux commandes de C polémique ?
Bruce Toussaint : Nous avons réussi à installer cette double case politique le dimanche. C’est toujours difficile de lancer des émissions. D’abord on ne sait pas comment le public va réagir et si on a la capacité de mettre en œuvre ce qu’on a imaginé. Là, je crois que c’est bien parti, il y a une bonne alchimie entre les deux émissions. Nous n’avons pas anticipé un tel appétit politique de la part des téléspectateurs pour cette élection présidentielle, devenue complètement folle. Le scénario politique nous a aidé à valider le choix qui a été fait par la chaîne.
Quel est selon vous l’événement le plus marquant de ce début de campagne ?
B. T. : C’est vraiment l’incertitude. Au-delà de l’affaire Fillon, de la montée de Marine Le Pen ou de la victoire aux primaires de Benoît Hamon, je crois que c’est l’incertitude qui prévaut. Tous les observateurs aguerris le disent, il y a pour la première fois, dans l’histoire de la Ve République, une élection qui n’est pas écrite à l’avance. On peut l’expliquer par une certaine méfiance des gens vis-à-vis de la politique ou simplement par les rebondissements relatifs à la campagne. Mais ce qui me frappe le plus, c’est le flou incroyable qui règne à moins de soixante jours du premier tour. C’est très rare comme situation.
En sachant cela, comment choisissez-vous vos invités ?
B. T. : Notre règle est de donner la primeur aux intellectuels. On est une émission qui se veut un débat d’idées, le dimanche soir, en toute fin de semaine. Donc l’objectif est de prendre un peu de recul. L’intellectuel, le philosophe ne regarde pas l’actualité comme le journaliste. Il la regarde avec son prisme à lui, et c’est ça qui est intéressant. Depuis le début de la saison, nous avons eu la chance de recevoir déjà les plus grands intellectuels français. De Michel Onfray à Alain Finkielkraut, d’André Comte-Sponville à Emmanuel Todd, de Pascal Bruckner à Bernard-Henri Lévy.
Comment vous sentez-vous dans ce rôle d’« arbitre » ?
B. T. : Organiser un pugilat à la télévision, c’est facile. Et souvent, d’ailleurs, les participants sont plutôt consentants (rires). Mais France 5 n’est pas une chaîne où on retransmet des combats de boxe. C’est la chaîne de la réflexion et de l’analyse. Mon rôle est donc double : le premier est de faire circuler la parole et que chacun puisse s’exprimer de manière égalitaire. Le second, c’est que chacun soit dans la recherche d’un échange d’idées et jamais dans une querelle de personnes. Il m’arrive régulièrement de sermonner pour avoir un débat de bonne tenue. La grande chance que l’on a sur France 5, et particulièrement dans C polémique, c’est le temps de s’exprimer ! Et ça, les invités le recherchent beaucoup. J’apprécie de pouvoir le leur offrir.
En quoi l’exercice de C polémique diffère-t-il de celui de C dans l’air, dont vous partagez la présentation avec Caroline Roux ?
B. T. : C dans l’air est une émission où l’on peut plus facilement s’arrêter sur le jeu politicien. On est dans le pur décryptage, il n’y a pas d’opinions. Alors que dans C polémique chacun vient avec son opinion et essaye de la défendre. C dans l’air est une émission qui accompagne le téléspectateur depuis quinze ans. Cette année, elle connaît une très belle saison avec des audiences qui sont remarquables. Il faut dire qu’elle est très utile par rapport à tout ce qui se passe, on a besoin de comprendre. Je parlais de l’incertitude et on a plus que jamais besoin de C dans l’air pour comprendre cette élection présidentielle incroyable.
Propos recueillis par Ludovic Hoarau

Magazine
Présentation Karim Rissouli / Bruce Toussaint
Durée 125 min (65 + 60 min)
Réalisation Renaud Le Van Kim et Pascal Retif
Production France Télévisions / Together Média
#cpol
« C politique » en chiffres
601 000 téléspectateurs et 3,2 % de part d’audience de moyenne cette saison.
45 % de progression enregistrée par rapport à la saison passée (à tranche horaire et période équivalente).
Record de saison réalisé le 16 octobre 2016, à 736 000 téléspectateurs et 4,2 % de moyenne.
Source : Médiamat / Médiamétrie / Audience Veille
« C polémique » en chiffres
483 000 téléspectateurs et 1,9 % de part d’audience de moyenne cette saison.
36 % de progression enregistrée par rapport à la saison passée (à tranche horaire et période équivalente).
Record de saison réalisé le 5 février 2017, à 657 000 téléspectateurs et 2,6 % de moyenne.
Source : Médiamat / Médiamétrie / Audience Veille