Pendant des décennies, il a été prescrit aux jeunes enfants à titre préventif, pour lutter contre les caries. Pourtant, à doses élevées, le fluor s’avère préjudiciable pour la santé. Enquête sur un ennemi aussi omniprésent que redoutable.
Le fluor, dangereux ? Difficile d’y croire, tant il fait partie du quotidien, et ce depuis longtemps. Qui, en effet, n’en a pas pris dans son enfance ? Et qui a oublié les publicités des années 1980 vantant les vertus des dentifrices au fluor ? Couramment considérée comme anodine, cette substance peut, néanmoins, se révéler très nocive pour l’organisme. Dans ce documentaire proposé par Marina Carrère d’Encausse, la réalisatrice Audrey Gloaguen suit sa trace de la France aux États-Unis, en passant par l’Angleterre, et jusqu’aux îles Féroé. Malgré les signaux d’alarme émis par un certain nombre de scientifiques depuis des années, il a fallu attendre 2010 pour que l’Organisation mondiale de la santé le classe parmi les dix produits chimiques posant un problème majeur de santé publique, aux côtés de l’amiante, de l’arsenic ou des dioxines. Aujourd’hui, il n’y a plus de doute possible : le fluor est bien toxique, et cela à partir de 1 mg/jour pour les enfants et de 4 mg/jour pour les adultes. Or, la dose maximale est vite atteinte, car de nombreux produits courants en contiennent : sel de table, certaines eaux en bouteille, thé et même parfois eau du robinet… Sans le savoir, nous risquons ainsi de trop en ingérer. Avec des conséquences non négligeables sur la santé, à commencer par… les dents.
Des apports excessifs en fluor
À Strasbourg, le Pr Anne-Marie Musset, chef de pôle de chirurgie bucco-dentaire, connaît bien la question : « Dans la majorité des cas, en France, on voit des fluoroses (intoxication au fluor) chez des enfants qui ont avalé du dentifrice à fortes doses. L’émail devient poreux, se colore et finit par se détruire. » Selon une étude réalisée par le Pr Musset, 45 % des 4-12 ans ont des apports excessifs en fluor. Depuis 2009, une loi oblige les industriels à spécifier sur les tubes de dentifrice la dose recommandée aux enfants pour se laver les dents : celle de la taille d’un petit pois. Mais cela ne suffit pas, car le fluor se cache un peu partout. Ingéré en quantité importante, il provoque notamment des atteintes neurologiques chez les petits, mais aussi des fluoroses osseuses : les os se fragilisent et ont tendance à se casser. Pour éviter le surdosage, il faudrait donc réduire sa consommation de thé, proscrire certaines eaux, le sel de table ou les chewing-gums fluorés.
Une substance qui se cache un peu partout
Le problème, c’est que le fluor se dissimule également dans le revêtement antiadhésif de nos poêles, les vêtements, sacs à dos ou de couchage, chaussures, boîtes à pizza et autres, sous forme de composants perfluorés. Ces PFC, omniprésents sur la planète, contaminent les cours d’eau et se dispersent sous la forme de gaz ou de particules fines. Selon Manfred Santen, chimiste, membre de Greenpeace-Allemagne, « ils s’accumulent dans les organes comme les reins ou le foie et ne sont éliminés qu’au bout de plusieurs années ». Or, des épidémiologistes reconnus ont déjà établi le rapport entre les PFC et des maladies graves telles que les cancers du rein et des testicules ou la colite ulcéreuse. Afin d’en finir avec ce véritable poison, certaines marques, à l’instar d’Adidas, commencent à rechercher des solutions de remplacement, mais le chemin à parcourir est encore long.
Beatriz Loiseau
Documentaire
Durée 52 min
Réalisation Audrey Gloaguen
Production Dream Way Productions, avec la participation de France Télévisions
Année 2016
#LMEF