Révélées pour la première fois, de nouvelles archives politiques et personnelles éclairent les zones d’ombre sur les jours qui ont précédé le suicide d’Adolf Hitler et d’Eva Braun, terrés dans le bunker de la Chancellerie du IIIe Reich. Ces documents uniques permettent de mieux analyser et de vivre de l’intérieur les derniers instants du Führer.
Le 25 novembre 1945, sept mois après l’entrée des Soviétiques dans Berlin, un groupe de Français pénètre dans le bunker où Hitler a vécu ses derniers jours. Parmi eux, le commandant Raymond Rose. « Des milliers de personnes ont voulu voir ce que les Soviétiques appelaient “la tanière de la bête” », raconte l’historien Jean Lopez. L’officier s’enfonce dans les souterrains où, dans le chaos qui règne encore, il s’empare d’une pile de papiers laissés en vrac. Il racontera plus tard : « C’est dans la pièce la plus reculée que j’ai trouvé les documents qui établissent qu’Hitler voulait rester, quoi qu’il arrive, le maître envers et contre tout, même contre les événements. » Pourtant, il ne saisit pas encore la portée historique de sa découverte. Ce n’est que soixante-dix ans plus tard qu’un collectionneur privé, Bruno Ledoux, les met à disposition du public : « Il a conservé ces documents toute sa vie. Je pense qu’il n’avait pas le recul de l’Histoire. Pour lui, c’était un acte beaucoup plus émotionnel. » Or, ces messages officiels, ces lettres et ces échanges avec sa garde rapprochée apportent aujourd’hui une nouvelle vision des derniers moments du Führer. Depuis sa décision le 15 avril 1945 de s’établir définitivement dans le bunker, à cause des bombardements qui frappent jour et nuit Berlin, jusqu’à son suicide avec Eva Braun le 30 avril, ce film déroule heure par heure le fil de ces journées dans une atmosphère de huis clos crépusculaire.
Une mise en scène de type wagnérien
On y découvre l’organisation de cet « endroit sordide » où Hitler, « très délabré, dans un état de parkinsonisme avancé », selon l’historien François Kersaudy, est entouré par une trentaine de personnes, dont Joseph Goebbels et son secrétaire particulier Martin Bormann. Malgré lui, sa maîtresse Eva Braun l’a rejoint également : il l’épousera, à sa demande, la nuit du 29 avril. Pièce exceptionnelle, une photo avec la dédicace « À mon Führer, en fidélité, ton Eva » constitue le seul témoignage de cet amour, et deux lettres écrites de sa main donnent une idée de l’ambiance dans le bunker. Dans la première, explique l’historien Xavier Aiolfi, « on y voit encore une certaine lueur d’espoir ». Mais, le 20 avril, jour de l’anniversaire d’Hitler, les chars de l’Armée rouge entrent dans Berlin. La question se pose alors de quitter la capitale : « Hitler décide qu’il vaut mieux mourir, précise Jean Lopez, avec une vaste mise en scène de type wagnérien, apocalyptique, qui consiste à mourir avec ses troupes dans Berlin. » Le 22 avril, la deuxième lettre d’Eva Braun à sa meilleure amie exprime le désespoir qui a envahi désormais le bunker et évoque la décision du couple de se suicider. Dès lors, le compte à rebours commence…
Le 23 avril, le Führer passe la main à Göring, commandant en chef de l’armée de l’air. Treize lettres et télégrammes témoignent de ces derniers échanges entre les deux hommes. Hitler reçoit sa décision de prendre les pleins pouvoirs comme la traîtrise ultime de son collaborateur : un sentiment nourri par la haine de Bormann. Il démettra également de toutes ses fonctions Himmler, le chef des SS et architecte de la « solution finale », coupable d’avoir proposé une reddition sans condition aux Alliés. Jusqu’au bout, Hitler restera convaincu qu’il ne doit sa défaite qu’à la trahison de ses plus proches…
Anne-Laure Fournier
Documentaire
Durée 52 min
Auteur-réalisateur Emmanuel Amara
Production Adamis Production, avec la participation de France Télévisions et le soutien du CNC
Avec la voix de Pascal Elbé
Année 2015
#lacasedusiecle