Le tourisme religieux peut-il enrayer l’exode de la population et le déclin de l’île de Futuna ?
A Futuna, il n’y a pas de ressources naturelles (exploitées), mais il y a mieux : une ressource surnaturelle, Saint Pierre Chanel, le Saint Patron de l’Océanie, dont on fêtait, le 28 avril 2016, le 175ème anniversaire du martyre. Et il y a les Futuniens, qui ont une foi à déplacer les montagnes … et à construire des églises. L’évêque et les habitants de l’île ont donc eu une idée: faire de Futuna une destination internationale pour le tourisme religieux, le « Lourdes du Pacifique », qui pourrait bénéficier aussi à l’île voisine de Wallis. Ce serait un miracle !
Ce documentaire raconte les conditions de ce miracle à travers ceux qui oeuvrent à le rendre possible, mais aussi à travers ceux qui craignent une fuite en avant illusoire, au risque d’épuiser les maigres ressources financières de la diaspora de Nouvelle-Calédonie, appelée à payer pour ce développement.
Entre rêve un peu fou porté par une foi sincère et réalité de l’isolement et des ravages de la mondialisation, ce film est une comédie douce, portée par la joie et l’optimisme d’un peuple mal connu.
A l’instar des films précédents réalisés par Anne Pitoiset et Laurent Cibien (à l’exception du « Nickel des Kanak », qui nécessitait beaucoup plus d’explications « techniques »), le film a pour seul commentaire, un propos introductif. Pris ensemble, leurs documentaires (« Sous le vent de l’usine », « Génération Matignon », « Tavaka » et « Il suffirait d’un miracle ») constituent une série, tant sur la forme que sur le fond, des îles du Pacifique, territoires français, dont les habitants sont confrontés aux enjeux de la modernité.
Il s’agit d’un choix esthétique et éthique. Le point de vue des auteurs est celui d’observateurs extérieurs qui ne s’autorisent pas à dire à la place des acteurs de cette histoire ce qui est en train de se passer. Cette proposition, présentée aux différents interlocuteurs interviewés a été particulièrement bien reçue et a ajouté, à leurs yeux, de la crédibilité à la démarche.
« Il suffirait d’un miracle » est un film qui se tisse à travers les paroles des uns et des autres, paroles qui se complètent ou parfois s’opposent. Il est construit autour d’une narration principale (portée par l’enchaînement des paroles de nos interlocuteurs) et d’une narration secondaire (le déroulement de la semaine de pèlerinage).
Dans ce travail de haute couture, qui se déroule en trois lieux différents – Futuna, Wallis et Nouvelle-Calédonie - chaque pièce joue un rôle (parole, son, image, musique). Les images « parlent » d’elles-mêmes au spectateur, lui font « ressentir quelque chose » - même si il ne « comprend » pas toujours toutes les subtilités de la problématique. « Nous considérons, en effet, qu’il n’est pas grave de ne pas tout « comprendre », mais beaucoup plus embêtant de ne rien « ressentir », expliquent les réalisateurs Anne Pitoiset et Laurent Cibien.