Sur le front - Saumon
Sur le front 

La vérité sur le saumon

Mardi 22 février 2022 à 22.05

Que choisir ? Saumon d’élevage ou saumon sauvage ? Hugo Clément révèle la face cachée des fermes à saumons en Europe et part à la rencontre de celles et ceux qui se battent pour sauver les tous derniers saumons sauvages des rivières françaises.

Éditorial d'Hugo Clément - Journaliste

Il n’est pas nécessaire d’aller très loin pour enquêter sur les saumons. J’ai découvert que tout près de chez moi, au Pays basque, des saumons sauvages sont pêchés légalement et vendus à prix d’or — pourtant, l’espèce est menacée car il n’en reste que quelques milliers en France. On trouve encore quelques spécimens dans l’Adour, la Loire et un peu en Bretagne alors que, historiquement, il y en avait partout : dans la Seine, le Rhin, la Gironde… Heureusement, des militants se battent pour les sauver. Philippe met toute son énergie pour interdire cette pêche au Pays Basque. Dans l’Allier, Céline organise des relâchés d’alevins et a réussi à faire modifier la conception d’un barrage hydroélectrique d’EDF. Les travaux ont commencé : l’installation sera bientôt totalement ouverte pour laisser remonter les saumons pendant la période de frayage.

On me demande souvent s’il vaut mieux acheter du saumon d’élevage ou du saumon sauvage, en particulier au moment des fêtes de Noël. Instinctivement, on pourrait se dire qu’en achetant du poisson d’élevage, on n’endommage pas la ressource en mer. Ce n’est hélas pas aussi simple car les saumons d’élevage sont nourris avec d’autres poissons. Lorsqu’on achète un saumon d’élevage d’1 kilo, il a été nourri avec 4 kilos de petits poissons sauvages. Des bateaux industriels vident la mer en Afrique de l’Ouest pour alimenter les fermes à saumons en Europe. Au Sénégal, la situation est alarmante, les habitants ne trouvent plus le poisson nécessaire à leur subsistance.

Exceptionnellement, nous avons pu nous infiltrer dans une ferme de saumons en Écosse. Les poissons sont élevés dans des conditions épouvantables, semblables aux élevages intensifs de porcs ou de poulets. Nous avons découvert des poissons infestés de poux de mer, entassés dans des cages sous-marines, gavés d’antibiotiques. Pourtant certains d’entre eux arrivent sur nos tables étiquetés « Label Rouge » !

Mais partout dans le monde, des citoyens et des scientifiques se battent pour trouver des solutions : des chercheurs français tentent de rendre le saumon végétarien et un éleveur normand veut les nourrir avec des insectes.

Le saumon a besoin de nous. Il faut changer le mode d’élevage et le sauver dans nos rivières, avant qu’il ne soit trop tard.

 
Séquences exceptionnelles

La guerre du saumon au Pays basque

Sur le front - saumon

Chaque année au printemps, les pêcheurs et les militants se livrent une « guerre du saumon », dans le fleuve Adour. Il n’y a plus que quelques milliers de saumons sauvages, en provenance du Groenland, ils arrivent à Bayonne pour remonter l’Adour et se reproduire dans les rivières des Pyrénées. Bien que menacés d’extinction, ils sont capturés par des filets dès leur entrée dans l’estuaire et sont vendus comme des produits de luxe : 95 euros le kilo et près de 300 euros une fois fumés ! 1 saumon sauvage sur 3 est ainsi piégé dans un filet alors que l’espèce est protégée !

La face cachée d’un élevage de saumons en Ecosse

Sur le front - saumon

Il est très difficile de s’infiltrer dans un élevage de saumons d’Ecosse mais l’équipe de Sur le Front a pu le faire avec la complicité d’un militant très engagé. Ces poissons migrateurs à l’origine vivent dans des cages exiguës, ils sont infestés de poux de mer et gorgés d’antibiotiques. Malgré ces déplorables conditions d’élevages, ces saumons se retrouvent sur nos tables.

Les usines de farine de poissons au Sénégal vident l’océan.

Sur le front - saumon

Des bateaux de pêche industrielle pêchent la sardinelle (un petit poisson local que les saumons ne rencontrent jamais dans l’océan) pour la transformer en farine et alimenter les fermes à saumons d’Europe.  La population locale ne trouve plus suffisamment de sardinelles pour se nourrir !

Les saumons du futur seront peut-être végétariens

Sur le front - saumon

Ce serait une solution pour nourrir les poissons d’élevage sans endommager le milieu marin : rendre les saumons végétariens et les nourrir avec des protéines végétales. Des scientifiques français de l’INRAE mettent tout en œuvre pour atteindre cet objectif. Ils réalisent depuis dix ans des expériences sur les truites, en les nourrissant avec de la farine végétale.  Les résultats sont très prometteurs.

Un barrage hydraulique transformé pour sauver les saumons dans l’Allier

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Le Conservatoire National du saumon sauvage a remporté une bataille : convaincre EDF de transformer le barrage hydraulique Poutès. Les travaux ont commencé. Le barrage sera totalement ouvert trois mois par an, à la période cruciale où les derniers saumons viennent frayer dans la rivière.

Mobilisation contre la plus grosse ferme à saumons d’Europe en projet à Boulogne-sur-Mer

@ Winter productions

Des militants de la cause animale se battent sans relâche depuis un an contre le plus grand projet de ce type en Europe : la plus vaste ferme à saumons sur terre dont l’installation est prévue à Boulogne-sur-Mer. Elle devrait produire près de 2 millions de saumons chaque année. Une aberration pour les écologistes. Nous les avons suivis dans leur lutte.

Portraits et Verbatim

Philippe Garcia

Ce militant de 61 ans est président de l’Association de défense des ressources marines. Chirurgien ophtalmologique à la retraite, il a décidé, il y a quatre ans, de se consacrer à la préservation du saumon dans l’Adour. Aujourd’hui, il alerte l’opinion publique sur la pêche aux saumons et sur l’urgence à sauver une espèce menacée.

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“C’est un peu comme si je vous disais, tiens on va continuer à tuer les rhinocéros blancs ou les tigres du Bengale. On ferme les yeux sur cette hémorragie côtière qui est inadmissible".

Don Staniford

Don, engagé́ depuis plusieurs années dans la « Scottish Salmon Watch », lutte contre les élevages de saumons en Ecosse. Grâce à lui nous avons pu nous introduire dans ces gigantesques fermes en pleine mer et filmer une consternante réalité.

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“Ça fait 23 ans que je me bats contre l’élevage de saumons et j’ai vu l’industrie se développer. Pour moi, toutes ces cages, ce sont des cellules cancéreuses qui se développent à toute vitesse.”

Seynabou Dieng

Seynabou fume le poisson au Sénégal pour le conserver plus facilement et l’exporter dans toute l’Afrique de l’Ouest. Aujourd’hui, elle ne parvient plus a acheter suffisamment de poisson au marché́. Elle a donc décidé de lutter contre la surpêche des sardinelles et leur transformation en farine destinée aux élevages de saumon. Elle a réussi à empêcher l’agrandissement d’une usine de farine.

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“Ici c’était rempli de poissons, mais vous voyez bien qu’il n’y en a pas aujourd’hui, parce qu’ils sont de plus en plus rares. Les pirogues reviennent à vides et les pêcheurs ne gagnent plus d’argent : ils ne peuvent même pas rembourser l’essence qu’ils consomment pour aller pêcher.”

Céline Bérard

Directrice du Conservatoire National du saumon sauvage, elle se bat depuis plus de 20 ans pour préserver cette espèce, la dernière souche d’Europe capable de parcourir près de 1000 kilomètres en eau douce pour se reproduire. Céline a obtenu que le barrage EDF de Poutès reconsidère sa conception afin de faciliter le passage de ces poissons migrateurs gravement menacés. Chaque année, elle organise le relâché de 300 000 alvins

 

Sur le front - saumon

« Ça me tient à cœur de pouvoir transmettre ce saumon aux générations suivantes, ça serait dommage de le perdre aujourd’hui alors qu’il est là depuis des millénaires. »

 

Présentation
Hugo Clément

Production
Winter Productions

Avec la participation de
France Télévisions 

Production
Régis Lamanna-Rodat
Hugo Clément

Rédaction en chef
Pierre Grange

Réalisation
Jean-Baptiste Jacquet

Direction des magazines 
Nicolas Daniel
Thibault Romain
Patricia Corphie
Sophie Martin

 

Le documentaire est disponible en visionnage sur 
france.tvpreview

Sabine Michel
Responsable projets et actions de communication Guadeloupe la 1ère