TRÉSORS VOLÉS

Trésors volés

Série documentaire - Inédit - Jeudi 22 décembre 2016 à 23.10

Trésors volés, ou l’invention du « pol’art ». En racontant quatre histoires à peine croyables de vols de tableaux et de statues, Olivier Widmaier-Picasso, petit-fils du peintre, tisse ensemble suspense du polar et mystère de l’art. Explications croisées, avec le réalisateur Guillaume Perez.

Olivier Widmaier-Picasso, on vous a vu notamment sur France 2 dans L’Art à tout prix, immersion documentaire dans les coulisses du Prix Marcel-Duchamp, que vous aviez animé aux côtés de Louise Ekland. Aujourd’hui, vous présentez cette nouvelle émission consacrée au vol d’œuvres d’art…
Olivier Widmaier-Picasso
 : Parler d’art autrement, de façon accessible et atypique, c’est tout ce que j’aime faire à la télévision. Ici, en s’appuyant sur les principes du polar, Trésors volés décrypte des œuvres aussi différentes que L’Enfant à la bulle de savon de Rembrandt ou La Femme à l’éventail de Modigliani. En racontant le vol de ces toiles, on raconte à la fois l’histoire d’une enquête – haletante, marquée par de multiples rebondissements, impliquant de nombreux intervenants – et l’histoire de l’art.

Guillaume Perez, vous êtes le réalisateur de cette série documentaire. Comment a-t-elle commencé ? 
Guillaume Perez : Tout est parti du Musée invisible (éd. Toucan), le passionnant livre que le journaliste Nathaniel Herzberg a consacré à ces dizaines de milliers de tableaux, sculptures, meubles, objets d’art volés au fil du temps. Interpol estime aujourd’hui que le trafic d’œuvres d’art volées ou pillées est le quatrième marché illégal au monde, où opèrent des mafias et, parfois, des groupes terroristes. En se penchant, comme nous l’avons fait, pendant les huit mois qu’ont nécessités la préparation et la réalisation de l’émission, sur quelques vols plus ou moins célèbres, plus ou moins spectaculaires – mais chaque fois incroyables –, on ne peut qu’être fasciné par la diversité des cas. Chaque œuvre, chaque vol, raconte une histoire différente. Il y a par exemple la fameuse razzia au Musée d’Art moderne de Paris. Dans la nuit du 19 au 20 mai 2010, cinq chefs-d’œuvre signés Picasso, Matisse, Braque, Modigliani et Léger ont été dérobés. Montant du cambriolage : près de 100 millions d’euros ! Partis pour ne prendre qu’une œuvre, les cambrioleurs ont profité d’une défaillance du système d’alarme pour en voler quatre autres, au jugé, comme ça… Nous avons aussi rencontré un voleur qui, fasciné depuis son plus jeune âge par L’Enfant à la bulle de savon de Rembrandt, a dérobé la toile au Musée de Draguignan. Il l’a conservée dans le plus grand secret pendant quinze ans puis, rongé par le remord, a fini par la rendre. Chaque épisode de Trésors volés est une surprise : on passe des arcanes du grand banditisme international aux scrupules d’un « voleur amoureux », d’un mystère à la Da Vinci Code à une blague potache qui tourne mal…

Le vol de l’art fascine-t-il autant que l’art lui-même ?
Olivier Widmaier-Picasso 
: Il y a des affaires qui restent malheureusement non élucidées, des œuvres qui ne réapparaissent pas et ne réapparaîtront peut-être jamais. Dorment-elles dans l’attente d’une hypothétique revente ou ont-elles été détruites ? Voler un tableau, c’est déjà quelque chose, mais encore faut-il être capable de le revendre. Aujourd’hui, les œuvres sont archivées, « tracées », répertoriées dans des bases de données internationales. Un revendeur ou un receleur doit fournir un certificat d’authenticité, il ne peut tricher ni sur l’origine de ce qu’il a en sa possession ni sur la façon dont il l’a eue en sa possession. C’est le cas, pour donner un exemple que je connais bien, de l’affaire de « l’électricien de Picasso », qui, pendant trente-sept ans, a gardé chez lui 271 créations que mon grand-père lui aurait données, et dont le procès pour vol et recel de vol connaît de multiples coups de théâtre. En général, la police s’intéresse d’abord à la famille, aux proches, aux ayant droit. Y a-t-il jalousie, captation ? Il y a aussi la possibilité d’un chantage aux assurances. Ensuite, viennent les cas de trafics à grande échelle, les œuvres d’art servant au blanchiment de l’argent sale. Il y a un marché noir parallèle, opaque, avec ses propres codes et fantasmes. Picasso est ainsi l’artiste le plus volé. Il y aurait 400 de ses œuvres perdues dans la nature. Et L’Allée de peupliers aux environs de Moret-sur-Loing d’Alfred Sisley est le tableau le plus convoité de France : d’abord spolié pendant la Seconde Guerre mondiale, il a été volé en 1978, 1998 et 2007. À chaque fois, heureusement, il a été retrouvé. Il est exposé aujourd’hui au Musée d’Orsay.

Chaque épisode de Trésors volés prend l’allure d’une investigation dont les ressorts n’ont rien à envier à une série policière…
Guillaume Perez
 : Nous reconstituons l’enquête de A à Z, interrogeant les différents protagonistes, qu’ils soient simples particuliers, conservateurs de musée ou policiers spécialisés. C’est l’occasion de mettre en lumière le travail de l’Office central de lutte contre le trafic des biens culturels (OCBC) ou du groupe « Objets volés de nature artistique, d’antiquité et de brocante » qui, moins connus que la Crim’ ou les Stup’, n’en sont pas moins des brigades émérites.

On sent un soin particulier apporté à l’image et au montage. Quelles ont été vos partis pris ?
Guillaume Perez
 : La narration joue avec les codes de l’enquête policière. Nous partons à la rencontre des uns et des autres, chez eux, pour recueillir, au fil des événements, leurs souvenirs et leurs témoignages. Mais je souhaitais que ces interviews échappent au cadre de l’interrogatoire, qu’elles soient baignées dans une ambiance crépusculaire, entre chien et loup – qui est proche d’une certaine idée du polar tout en respectant la dimension artistique inhérente au projet.

Olivier Widmaier-Picasso, présent à l’image, vous accompagnez le déroulement de l’enquête et apportez un éclairage historique et artistique sur les œuvres. On imagine que votre nom et votre connaissance du milieu ont joué un rôle important pour mener ces enquêtes…
Guillaume Perez
 : Il nous a ouvert de nombreuses portes !
Olivier Widmaier-Picasso : J’ai eu vocation à rassurer les intervenants sur le traitement qui allait être donné à l’affaire. Un traitement respectueux, complet, honnête et puis, au vu du résultat final, très inventif. Je dois dire que Guillaume Perez a su créer une réalisation originale, de très belle facture, qui rend hommage aux œuvres tout en réservant son lot de suspense.

La plupart des intervenants parlent avec beaucoup d’émotion des œuvres qui ont été volées, ce qui est l’occasion d’interroger le rapport que nous entretenons avec l’art…
Guillaume Perez
 : Il s’agit souvent d’un rapport très physique. Perdre une œuvre, c’est comme perdre un enfant… Les paroles des intervenants, qu’ils soient visiteurs, simples passants, amateurs d’art, conservateurs, gardiens de musée, témoignent encore, longtemps après les faits, d’une émotion à vif. Par exemple, le directeur du Musée d’Art moderne de Paris ne s’était encore jamais exprimé. Il était totalement traumatisé…
Olivier Widmaier-Picasso : Là, il a vraiment fallu le rassurer et le convaincre. Et l’on sent combien, à la fin de notre interview, il a su exorciser son traumatisme.

Vous attendiez-vous à ce que les témoignages soient aussi personnels ? Est-ce cela « parler d’art autrement » ?
Olivier Widmaier-Picasso
 : Quand quelqu’un évoque la disparition d’une œuvre, il parle d’abord d’un ressenti, d’un vécu parfois quotidien par rapport à cette œuvre. Parler d’art, c’est cela avant tout – avant les mots savants et les paroles d’expert. J’ai moi-même été confronté à un vol. Un matin de février 2007, ma sœur m’appelle pour me dire que Maya à la poupée et au cheval de bois, qui représente notre mère enfant, lui a été dérobé. Je n’ai pas pensé une seconde à la valeur financière, mais à tous nos souvenirs personnels. Comment expliquer à notre mère qu’on ne verrait plus ce tableau ? Heureusement, la police l’a retrouvé six mois plus tard, en bon état !
Guillaume Perez : Pour ces premiers épisodes, notre choix s’est délibérément porté sur des affaires publiques, que les vols aient eu lieu au musée ou, comme pour le buste de Dora Maar par Picasso, dans un square parisien. Nous voulions que chacun ressente le manque que provoque l’absence de l’art. Et nous voulions que, dans sa façon de présenter l’émission, Olivier Widmaier-Picasso prenne en charge une certaine subjectivité, une émotivité, voire une forme d’indignation. Le vol d’une œuvre d’art n’est pas quelque chose d’anodin, mais un événement grave qui nous prive tous de notre héritage commun. Trésors volés s’adresse vraiment à tous types de téléspectateurs, y compris ceux qui ne fréquentent pas, ou peu, les musées. L’occasion de prendre la mesure de ce que représente l’art pour tous et pour chacun. On ne peut pas soustraire à nos yeux des toiles ou des statues qui forment le patrimoine de notre humanité.
Olivier Widmaier-Picasso : Quand on pense par exemple à la destruction, aux pillages et aux trafics qui ont eu lieu à Mossoul ou à Palmyre, on comprend toute l’importance non seulement culturelle mais aussi politique de l’art ou, en l’occurrence de sa disparition.

Propos recueillis par Cyrille Latour

Sur une idée originale de Vincent Feragus et Stéphane Simon
Présenté par Olivier Widmaier-Picasso
Réalisé par Guillaume Perez
Produit par OUTSIDE FILMS avec la participation de France Télévisions
Une production Outside Vincent Feragus, Stéphane Simon et Gilles de Maistre
Responsables des programmes France 2 : Solène Saint, Gilles Duval

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 Jeudi 22 décembre 2016

Cinq chefs-d’œuvre en péril
C’est l’une des plus grandes razzia d’œuvres d’art en France ! En une nuit disparaissent au Musée d’Art moderne de la Ville de Paris cinq chefs-d’œuvre signés Picasso, Braque, Matisse, Modigliani et Léger. C’était il y a cinq ans. Aujourd’hui, les voleurs ont été appréhendés (partis pour voler une seule œuvre, ils s’étaient emparé de cinq œuvres en quinze minutes profitant de la défaillance du système d’alarme du musée) mais les œuvres n’ont toujours pas été retrouvées. Ont-elles été détruites ou dorment-elles quelque part dans l’attente d être revendues ? Le mystère reste entier…

Où est passée la muse de Picasso ?
Dérobé une nuit de mars 1999 dans le square Laurent-Prache (VIe arrondissement de Paris) où il était installé, le buste de Dora Maar sculpté par Picasso est retrouvé en pleine forêt du Val-d'Oise par un employé municipal d'Osny... Ignorant tout de l'auteur et de la valeur de l'œuvre, la mairie l'expose dans son hall d'entrée, jusqu’à ce qu’un simple visiteur la reconnaisse lors des Journées du patrimoine !

Jeudi 29 décembre 2016

Le Voleur amoureux
L’Enfant à la bulle de savon, toile de petit format du maître Rembrandt, a disparu un jour au Musée de Draguignan. Elle a réapparu il y a deux ans après les aveux d’un homme qui avait eu un coup de cœur pour cette petite toile en visitant le musée avec sa mère, enfant, et qui l’a conservée pendant quinze ans près de lui dans le plus grand secret.

Micmac au pays du Soleil-Levant
Dans les années 1980, à Semur-en-Auxois, cinq toiles de maîtres signées Corot ont été volées dans le musée municipal de la ville. Ce vol est un des plus mythiques car c’est au Japon que les œuvres ont été retrouvées, impliquant la mafia japonaise et les redoutables yakuzas.

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