CERTAINS L'AIMENT CHAUD
Place au cinéma

Certains l'aiment chaud

Cinéma - Lundi 3 octobre 2016 à 20.45

La perruque de Jack Lemmon, les robes moulantes de Marilyn Monroe, les boucles d’oreilles de Tony Curtis et les répliques cultes signées Billy Wilder. « Personne n’est parfait », mais il se pourrait bien que ce film le soit : cette semaine dans « Place au cinéma », Dominique Besnehard propose de (re)découvrir « Certains l’aiment chaud ».

En pleine prohibition, pour échapper à un gang de mafieux lancé à leurs trousses, deux musiciens de jazz fauchés, Joe et Jerry (Tony Curtis et Jack Lemmon), intègrent une troupe de… musiciennes. Perruques, talons hauts, maquillage, bijoux, chapeaux : le camouflage est impeccable. Rebaptisés Joséphine et Daphné, les deux acolytes suivent le groupe en tournée et traversent les États-Unis incognito, de Chicago à la Floride. Ils n’auront de cesse de masquer leur masculinité, même si, ou parce que, au milieu de toutes ces femmes, leur planque ressemble, pour ces deux dragueurs invétérés, au supplice de Tantale. D’autant que le rôle ultime de la tentatrice est tenu par Marilyn Monroe, alors au sommet de sa carrière, tout en fragilité, ingénuité et sex-appeal. Dans la plus pure tradition de la comédie d’alors (comme dans L’Impossible Monsieur Bébé ou Allez coucher ailleurs, d’Howard Hawks), Certains l’aiment chaud, réalisé en 1959, joue évidemment des nombreux quiproquos que suppose ce soudain changement de garde-robe. Mais, surtout, derrière la grossièreté du travestissement, le film est l’occasion d’une fine relecture des rapports masculin-féminin. Sous leur maquillage, Joe et Jerry découvrent ce que signifie être femme dans un monde d’hommes. De prédateurs, ils deviennent proies. L’ensemble du film, jusqu’à la cultissime réplique finale (« Personne n’est pas parfait », rétorque simplement Osgood, le vieux garçon amoureux de Daphné/Jerry, quand celle-ci/celui-ci enlève sa perruque), est ainsi un troublant parcours initiatique.

Chef-d’œuvre transgenre

Si l’histoire fait la part belle au travestissement, Certains l’aiment chaud s’amuse, dans sa forme même, à entremêler les genres. S’ouvrant sur une fusillade, le film commence comme un polar noir avant de passer par le burlesque, la comédie musicale (célèbre version de I Wanna Be Loved by You, chantée/susurrée par Marilyn Monroe), le mélo, la romance, jusqu’au cartoon à la Tex Avery (les diverses œillades et onomatopées que réserve Osgood à Daphné/Jerry). À un rythme effréné, Billy Wilder enchaîne les séquences avec l’aisance et l’élégance d’un musicien de jazz lancé dans une improvisation endiablée. Le réalisateur, célèbre pour son humour noir, pince-sans-rire et distingué, fait preuve ici d’une maestria incomparable et offre un jubilatoire condensé de cinéma. Au sein d’une filmographie qui ne manque pourtant pas de pépites (Assurance sur la mort, Boulevard du crépuscule, Avanti !, Irma la Douce, Sept Ans de réflexion), Certains l’aiment chaud est considéré comme son chef-d’œuvre, récompensé à l’époque de nombreux prix (Golden Globe de la meilleure comédie, du meilleur acteur pour Jack Lemmon et de la meilleure actrice pour Marilyn Monroe) et régulièrement cité, depuis, dans la liste des films les plus drôles de l’histoire du cinéma.

Cyrille Latour

Film (États-Unis)

Durée 120 min

Réalisation Billy Wilder

Production Ashton Productions, Mirisch Company et United Artists

Avec Marilyn Monroe, Tony Curtis, Jack Lemmon…

Année 1959

 

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