Les Sceaux d'Utrecht

Lundi 11 avril 2022 à 22.25

1713, date de la signature du fameux traité d’Utrecht qui a changé la face du monde.


 

1713, date de la signature du fameux traité d’Utrecht qui a changé la face du monde. Cette mini-série documentaire animée par le rappeur métis/anishnabe SAMIAN présente l’histoire du point de vue de ceux qui n’étaient pas à la table pour signer un traité qui fut fort de conséquences pour toute l’Amérique. Ce regard sur les événements fait valoir la mentalité des cultures autochtones, acadiennes et européennes face à l’exploitation des terres et raconte le fondement de notre économie actuelle qui encore aujourd’hui exerce une exploitation sauvage des ressources naturelles.

Au cours de ses rencontres, Samian découvre et questionne les conséquences de ce traité avec des penseurs et militants tels que Serge Bouchard, Chef Ghislain Picard, Dominique Rankin, les historiens, Dale Miquelon, Renger de Bruin et Françoise Enguehard pour en nommer quelques uns.

Les Sceaux d'Utrecht / The Utrecht

Mini-série documentaire
4 x 26 minutes

Réalisateur / scénariste : Paul Bossé

Animateur : Samian

Production : Suzette Lagacé, Mozus productions

Synopsis

Épisode 1 « Ceux qui n’étaient pas à la table »

De la rivière Harricana en Abitibi jusqu’aux canaux d’Utrecht aux Pays-Bas, l’épisode suit les déplacements de Samian, un jeune rappeur québécois d'origine algonquine. Il se rend à Utrecht, une ville célébrant le 300e anniversaire de son fameux Traité de 1713, non pas pour fêter l’occasion, mais plutôt pour tenter de comprendre la portée de ce document crucial qui a tant façonné l’histoire du Canada et de ses habitants.

L’anthropologue québécois Serge Bouchard et l’historien canadien Dale Miquelon nous expliquent la mentalité coloniale des premiers arrivants au Nouveau-Monde : leurs justifications « légales » douteuses pour s’accaparer des terres et leur foi inébranlable en la pensée économique du mercantilisme.

Le néerlandais Renger de Bruin, conservateur du Centraal Museum à Utrecht, résume les grandes lignes de la Guerre de la Succession d’Espagne qui mène au Traité d’Utrecht. Il nous raconte les chambardements, parfois cocasses, occasionnés sur le petit bourg d’Utrecht par la venue de milliers de diplomates européens lors du Congrès de Paix.  Samian rencontre Renger au Centraal Museum et ce dernier lui montre l’actuel Traité d’Utrecht, un document que le jeune Algonquin trouve triste.

C’est un sentiment que partagent les aînés autochtones Alma Brooks et Daniel Paul, descendants de ceux qui n’étaient pas assis à la table des négociations d’Utrecht lorsqu’on a joué aux cartes avec leurs terres. Brooks et Paul nous annoncent que leurs peuples n’ont jamais cédé la moindre parcelle de terre aux nouveaux venus.

Selon Bouchard, un traité c’est : « des langues fourchues réunies dans un salon de mauvaise foi qui signent des papiers qui n’ont pas l’intention de respecter »

Épisode 2 « L’appât »

À partir du Cap de l’Espoir, le point le plus à l’est de l’Amérique du Nord,  Samian met en branle un épisode qui examine les conséquences historiques et sociales de l’article 13 du Traité d’Utrecht sur les habitants de l’ile de Terre-Neuve.  Trois Terre-neuviens, l’écrivaine Françoise Enguehard et les historiens Peter Pope et James Hiller, nous parlent de la venue, au début du XVIe siècle, des premiers pêcheurs sur l’ile et de l’établissement d’une industrie qui va rivaliser, voir dépasser la profitabilité des mines du Pérou et du Mexique.

Jusqu’au Traité d’Utrecht, l’ile sera divisée en deux avec le sud « appartenant » à la France, le nord à l’Angleterre. Suite au Traité, la France va perdre sa colonie de Plaisance, mais va garder ses droits de pêche à Terre-Neuve jusqu’en 1904.  Enguehard évoque ensuite la disparition progressive de la morue, véritable moteur économique de l’ile pendant un demi-millénaire, culminant avec le moratoire de 1992.

Alors qu’il explore l’ile, Samian est à la fois intrigué et désolé par la tragique saga de la Première Nation originel de l’ile, soit les Béothuks. L’anthropologue québécois Serge Bouchard et Peter Pope récapitulent le drame bouleversant de ce peuple dont la venue incessante de pêcheurs a poussé à la famine perpétuelle. Finalement, lorsque s’éteint Shanawdithit en 1829, il n’y a plus de Béothuk vivants sur l’ile de Terre-Neuve.

Samian rencontre le Chef Mi’kmaq Misel Joe qui lui parle des prouesses maritimes de son peuple pour qui l’ile de Terre-Neuve, ou le Tqamkuk, était une zone de chasse et de pêche depuis les temps immémoriaux.  Après des siècles difficiles, l’époque présente semble enfin offrir un peu de calme et de stabilité pour les Mi’kmaqs de l’ile.
Et, grâce aux découvertes d’importants champs pétrolifères au large de Terre-Neuve, l’homme d’affaires Rob Strong nous affirme que l’économie de Terre-Neuve-et-Labrador s’est lentement redressée du coup mortel asséné par le moratoire de la morue.

Épisode 3 « La Mikm’acadie »

En Nouvelle-Écosse, Samian découvre la Mi’kmaki, le territoire ancestral du peuple Mi’kmaq. Au 17e siècle, suite à la venue de Français dans la colonie qu’ils baptisèrent Acadie, une relation tout à fait unique en Amérique s’est formée entre les deux peuples. L’ainé Mi’kmaq Daniel Paul et l’historien acadien Ronnie-Gilles LeBlanc rappellent les liens serrés, souvent familiaux, qui se sont formés entre leurs ancêtres.

Les débuts d’une nouvelle société uniquement « américaine » qui s’est fait dramatiquement bouleverser par la Guerre de la Succession d’Espagne. L’historien Néo-écossais John Reid évoque le siège anglais du fort français de Port-Royal en 1710, évènement connu par la suite comme la Conquête de l’Acadie. Les historiens acadiens Ronnie-Gilles LeBlanc et Gregory Kennedy nous expliquent comment, suite au Traité d’Utrecht, dont l’article 12 cède l’Acadie à la Grande-Bretagne, il s’est ensuit d’interminables discussions entre Français et Anglais à savoir quelles étaient les limites géographiques de l’Acadie. Une question qui tracasse encore  actuellement beaucoup d’Acadiens.

À Kejimkujik, Samian rencontre Daniel Paul qui lui relate les effets souvent néfastes que le changement de régime a infligé sur le peuple Mi’kmaq, réduit, en 1838, à une population de 1200 âmes.  L’ainée Wolastoqiyik Alma Brooks appuie les commentaires de Paul en exposant les épreuves, souvent liées aux dégradations environnementales causées par les nouveaux-venus, que son peuple a dû surmonter et doivent encore, en 2013, affronter. Surtout depuis que, dans les provinces maritimes, l’extraction des gaz de schistes est devenue la nouvelle combine pour faire fortune. Mais pour forer, les camions d’extraction doivent traverser des chemins barrés par des activistes autochtones comme Alma Brooks. 

Épisode 4 « Plus ça change… »

Samian se rend à la Pointe-aux-Indiens au Lac Abitibi, un lieu sacré pour son peuple, les Anishinaabe, qui se rassemble là depuis environ huit millénaires. Il nous apprend qu’au 17e siècle, la dynamique de l’endroit se fait altérer par l’ouverture d’un comptoir de traite par les Français. C’est le début de la mondialisation!

L’anthropologue Serge Bouchard retrace les grandes lignes de l’épique histoire du commerce des fourrures au Canada, les luttes entre la France et l’Angleterre, les alliances avec les peuples autochtones et la fondation de la puissante Hudson’s Bay Company. D’ailleurs, l’article 10 du Traité d’Utrecht, dans lequel la France cède la Baie d’Hudson et tous ses bassins versants à la Grande-Bretagne, voit le jour grâce au lobbying de la HBC à Utrecht.

L’ainé Algonquin Dominique Rankin poursuit l’histoire de Bouchard en expliquant les conséquences de l’industrie des fourrures sur son peuple. Une histoire qui tourne mal et pour les autochtones et pour les animaux. Déjà, au début du 19e siècle, la ressource est presque complètement épuisée. Les chasseurs autochtones ne participent plus activement à l’économie coloniale.  Par après, avec la venue du chemin de fer et l’expansion vers l’ouest, les autochtones sont maintenant considérés comme étant « dans le chemin » du progrès. Le système s’impose pour les écarter , il se nomme « la réserve ».

Samian rencontre Ghislain Picard, le Chef de l’Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador qui lui annonce que quand tu es autochtone, « tu nais politique ».  Puis Serge Bouchard boucle la boucle en annonçant qu’on recommence les traités car, aujourd'hui, le Canada se prépare à une nouvelle série de négociations internationales sur le Grand Nord pour déterminer comment les terres arctiques vont se faire partager.