Temps fort semaine 28
Un an après l’attentat du 14 juillet à Nice, des femmes, des hommes, des enfants tentent de se reconstruire. Face à cette situation inédite, médecins et psychiatres réfléchissent et mettent en œuvre des protocoles de soins pour venir en aide rapidement aux nombreuses victimes. Créer une vie après un attentat.
Les nombreuses victimes de la tragédie du 14 juillet à Nice souffrent de stress post-traumatique, état qui se caractérise par le développement de symptômes spécifiques : insomnies, anxiété, palpitations… Comment faire face à un tel événement, comment gérer le deuil, réparer son corps et son esprit ? Les professionnels de la santé tentent de soulager et d’aider les patients à en sortir au plus vite. Émilie Petitjean est une maman désespérée ; elle a été prévenue par le père du petit Romain, âgé de 10 ans, qu’il avait été fauché par le camion sur la promenade des Anglais… Depuis, elle tente de vivre avec ce cauchemar. Elle est suivie par le psychiatre Laurent Gugenheim (hôpital Pasteur-CHU de Nice), mais avoue : « Je ne serai plus jamais heureuse, j’aurai des moments de bonheur, je le sais, mais qui seront entachés par l’absence de Romain… » Depuis janvier, elle est présidente de l’association La Promenade des anges, une manière de surmonter l’impossible et de partager avec d’autres victimes sa détresse.
Émilie Petitjean et le psychiatre Laurent Gugenheim. © Pulsations
Il y a un avant et un après-attentat
Depuis cet effroyable 14 juillet, de nombreuses personnes ont poussé les portes du service de psychiatrie de l’hôpital, comme Jean-Marc Dubois — « Depuis ce temps-là, ma vie s’est complètement arrêtée » — ou Élisabeth Preneron — « J’ai vu l’apocalypse, des corps dans tous les sens. » Alors les médecins s’interrogent et tentent de répondre aux besoins des patients, de créer de nouvelles prises en charge. Sur les conseils d’un confrère canadien, Alain Brunet, psychologue, chercheur en psycho-traumatologie à l’université McGill de Montréal, l’équipe du Pr Michel Benoit, chef du service de psychiatrie de l’adulte (hôpital Pasteur-CHU de Nice), étudie une thérapie nouvelle : « Il est important de proposer un outil complémentaire thérapeutique qui soit applicable à une large proportion de personnes impliquées dans un événement de masse. » Cet outil innovant consiste en la prise d’un médicament, le propranolol, associée à une psychothérapie permettant de diminuer la charge émotionnelle et les manifestations physiques attribuées à un souvenir traumatisant. Élisabeth suit ce nouveau traitement pour continuer sa vie avec « ça », pour reconstruire le souvenir en le dissociant des manifestations de stress. Les images restent, mais le stress doit être évacué. « Si c’est le meilleur moyen de s’en sortir… Il faut le faire », déclare Élisabeth. Cette thérapie est courte. Une séance par semaine pendant huit semaines. Ce n’est pas une solution miracle mais un accélérateur.
L’attentat a fragilisé le lien familial
Depuis l’attentat, l’équipe de pédopsychiatrie de l’hôpital Lenval-CHU de Nice, a vu plus de 1 300 enfants et une quinzaine de nouveaux patients consultent chaque semaine. Pour Florence Askenazy, chef du service de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent, la situation reste alarmante : « Bientôt, nous n’arriverons plus à répondre à la demande, parce qu’elle ne tarit pas, c’est comme une fontaine. » L’Association française des victimes du terrorisme a mis en place un programme inédit et pluridisciplinaire. « L’objectif, c’est de mobiliser des émotions, de nouvelles sensations pour des enfants qui ont vécu un traumatisme, et qui ont été pour certains, voire tous, sidérés par les événements… » déclare la pédopsychiatre Michèle Battista, de l’hôpital Lenval. Les enfants traumatisés doivent redevenir les acteurs de leur avenir.
Françoise Jallot
Documentaire
Durée 26 min
Réalisation Lucile Degoud
Production Pulsations, avec la participation France Télévisions
Année 2017
france.tv/france-5/le-magazine-de-la-sante
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