DUELS
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Ferry-Clemenceau : le calme et la tempête

Collection documentaire - Jeudi 28 avril 2016 à 22.20

Jules Ferry et Georges Clemenceau, tous deux patriotes, républicains, journalistes, athées et de gauche, se sont combattus sans relâche entre 1870 et 1893. Grâce à la collaboration d’historiens et de street artists, ce film retrace de façon originale ce duel plus que jamais d’actualité.

« Ce sont deux hommes qui auraient dû pouvoir s’entendre, souligne l’historienne Mona Ozouf, et puis ça s’est très mal passé… » Ferry, fils d’avocat et libre penseur lorrain, et Clemenceau, fils de médecin progressiste et fervent républicain, ont en commun la même passion pour la République. Mais « Clemenceau est d’abord convaincu que c’est l’individu qui fait avancer les sociétés, précise l’historien Jean-Noël Jeanneney. Chez Jules Ferry, il y a davantage l’idée que les progrès sont collectifs ».

Acte I

L’histoire du duel qui les opposa jusqu’à la mort de Ferry, en 1893, se raconte en trois actes, et commence le 4 septembre 1870, lors de la proclamation de la IIIe République. Tandis que Georges Clemenceau est nommé maire du XVIIIe arrondissement de Paris, Jules Ferry est nommé secrétaire général du gouvernement, puis maire de la capitale, assiégée par les Prussiens. Il échoue dans sa mission de ravitaillement, qui lui vaudra le sobriquet de « Ferry-Famine ». Lorsque le gouvernement propose de signer l’armistice, il déclenche l’ire du peuple et de Clemenceau : les proches de celui-ci prennent en otages Ferry et d’autres membres du gouvernement... « À partir de là, on a le sentiment que le portrait de chacun d’eux est fixé définitivement pour l’autre, explique Mona Ozouf. Clemenceau verra toujours Ferry en bourgeois, en partisan de l’ordre, en adversaire du mouvement. Et Ferry verra toujours Clemenceau en conducteur irréfléchi de la foudre révolutionnaire… Cette hostilité va se retrouver d’un bout à l’autre de leur parcours politique. » Les années troubles qui suivent, marquées par l’armistice et la perte de l’Alsace-Lorraine, le retour des royalistes, la violence contre l’extrême gauche et la Commune, vont laisser des traces indélébiles chez chacun d’eux.

Acte II

Le deuxième acte s’ouvre en 1876, lorsque les républicains remportent les élections législatives face aux royalistes. Trois ans plus tard, Ferry est nommé ministre de l’Éducation. « L’obsession ferryste, rappelle Mona Ozouf, c’est pérenniser la République, la faire durer. D’où ses choix fondamentaux : refaire cette unité nationale par l’école. » Une fois de plus, les deux hommes s’affrontent sur la méthode. Clemenceau, l’impatient, réclame l’institution immédiate d’une école obligatoire, gratuite et laïque. Ferry, le pragmatique, veut fractionner ses réformes. Au centre du débat, le parti clérical que Clemenceau, le radical, qualifie de « seul parti hostile : c’est le parti de la contre-révolution ». Pour Ferry, le modéré : « l’œuvre de la République n’est pas une œuvre de sectaires. Oui, nous avons voulu la lutte anticléricale, mais la lutte antireligieuse, jamais ! » Lorsqu’en 1880 Ferry devient président du Conseil, il fait voter les lois pour l’école obligatoire, gratuite et finalement laïque, à l’unanimité du Parti républicain. En 1881, c’est la conquête soudaine de la Tunisie décidée par Ferry qui va de nouveau opposer les deux hommes — et pousser le président du Conseil à la démission.

Acte III

Il le redevient en 1883 pour le dernier acte : celui de la rupture définitive. Jules Ferry affirme sa volonté d’expansion coloniale pour redonner sa puissance à la France. « Clemenceau pense, rappelle l’historien Michel Winock, que ce n’est certainement pas par les conquêtes que la France va montrer son exemple. Mais en déclarant au monde que l’ère de la démocratie est arrivée. » La conférence de Berlin de 1884, où les pays occidentaux se partagent l’Afrique, sous la houlette de Bismarck, va creuser le sillon de leur opposition. Avec l’enlisement de la France au Tonkin, Ferry est accusé de haute trahison et conduit une nouvelle fois à la démission à l’instigation de Clemenceau… D’eux, l’Histoire retiendra notamment ce que Michel Winock résume par un « Ferry, champion de l’école ; Clemenceau, champion de l’anticolonialisme. »

Anne-Laure Fournier

DUELS

Collection documentaire

Durée 52 min

Auteur-réalisateur Joël Calmettes

Production Chiloé Productions, avec la participation de France Télévisions

Année 2015

Disponible en audiodescription

 

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