Identifiés il y a une dizaine d’années, les virus géants défient les dogmes de la virologie par leur taille et leur complexité. Explications d’experts et animation 3D à l’appui, ce documentaire revient sur cette découverte qui bouscule aujourd’hui la science moderne.
1992. Le microbiologiste Timothy Rowbotham, qui travaille sur une épidémie de légionellose à l’hôpital de Bradford, dans le nord de l’Angleterre, isole par hasard un mystérieux microbe. Cet étrange individu affecte les amibes, des êtres unicellulaires adorant les milieux humides et chauds et se nourrissant de bactéries, comme les légionnelles, responsables d’une grave infection respiratoire. Si Rowbotham a du mal à identifier ce micro-organisme, baptisé « Bradford coccus », il est pourtant loin de se douter que sa découverte va révolutionner l’histoire de la virologie. « Je pensais que c’était une bactérie, se souvient-il. Il ne m’est jamais venu à l’esprit que ce serait un virus géant. Parce que les virus sont petits, que vous ne pouvez généralement pas les voir sous un microscope optique, contrairement à celui-là. »
Une nouvelle aventure scientifique en marche
Dix ans plus tard, Bernard La Scola, biologiste à l’université de Marseille, découvre qu’il s’agit en fait du plus gros virus jamais identifié. Renommé « Mimivirus » (microbe mimicking virus), cet organisme est remarquable par sa taille mais aussi par la complexité de son génome. « C’est de l’ordre de 1 000 gènes, explique le chercheur Jean-Michel Claverie, qui a en effectué le séquençage complet. Alors que dans un virus classique, comme le VIH, vous n’avez pas plus d’une dizaine de gènes. » Mais, surtout, Mimivirus n’est que le premier représentant d’une famille d’organismes inconnus jusqu’alors. Depuis sa découverte, d’autres congénères, parfois très différents les uns des autres, ont été retrouvés dans des colonnes de climatisation, mais aussi dans les profondeurs des océans, dans des micro-organismes marins, dans le pergélisol sibérien et même dans le sang humain.
L’existence de tels monstres — certains vieux de 30 000 ans — force les scientifiques à se replonger dans la définition même d’un virus et engendre des interrogations sur leur origine évolutive. Ces géants semblent intermédiaires entre le monde viral, supposé non vivant, et le monde vivant cellulaire. Représentent-ils une nouvelle branche de la vie sur notre planète ? Quel rôle jouent-ils dans l’arbre phylogénétique des espèces ? Et si les virus géants étaient le chaînon manquant de l’évolution ?
Amandine Deroubaix
Documentaire
Durée 52 min
Auteurs François-Xavier Vives et Hervé Dresen
Réalisation François-Xavier Vives
Production Transparences Productions / CNRS Images, avec la participation de France Télévisions
Année 2016