LE CORBEAU

Après Quai des Orfèvres, « Le Cinéma de minuit » continue son hommage à celui que l’on surnomme « le Hitchcock français ». Maître du film noir et du suspense, Henri-Georges Clouzot a bien failli ne pas avoir la carrière qu’on lui connaît.
Tourné sous l’occupation allemande et sorti en 1943, Le Corbeau raconte l’histoire d’un expéditeur de lettres anonymes. Salué alors comme un chef-d’œuvre, le film est interdit deux ans plus tard, à la Libération. Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, le thème abordé est brûlant, et Clouzot s’attire les foudres à la fois de la presse communiste et des conservateurs. On lui reproche son immoralité et de donner une mauvaise image du peuple français. Ses détracteurs iront jusqu’à qualifier le film d’« acte de collaboration ». Il faut dire que la production est assurée par la Continental Films, société allemande basée en France et créée par un certain Joseph Goebbels. En 1945, alors qu’une partie des effectifs de la Continental est emprisonnée, Clouzot s’en sort avec une suspension professionnelle à vie. Suspension qui sera finalement levée en 1947. Avec Le Corbeau, il signe un film sans concession sur la lâcheté humaine.

Ludovic Hoarau