ARABIE SAOUDITE, LES LIAISONS DANGEREUSES
Le monde en face

Arabie Saoudite : les liaisons dangereuses

Documentaire - Mardi 13 décembre 2016 à 20.45

Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, l’Arabie saoudite est au centre de toutes les stratégies d’alliance au Moyen-Orient. Pointée du doigt pour avoir créé les conditions du djihad, la monarchie de la péninsule arabique reste un allié incontournable des puissances occidentales…

C’est à bord d’un croiseur, l’USS Quincy, que Franklin Roosevelt scelle un premier pacte avec Ibn Saoud, le fondateur du royaume d’Arabie saoudite, quelques jours seulement après la conférence de Yalta. L’avenir de la jeune monarchie sunnite est dès lors étroitement lié aux États-Unis : ceux-ci assureront la sécurité du régime en échange de l’exploitation des champs pétroliers par les compagnies américaines. C’est le début d’une alliance au long cours entre les pays occidentaux et l’une des dernières monarchies absolues du monde. Une autocratie tenue d’une main de fer par la dynastie Saoud, qui a durablement assis son pouvoir en le partageant avec les wahhabites, un ordre religieux rigoriste qui applique l’islam comme au temps du prophète Mahomet au VIIe siècle.

Panislamisme contre panarabisme

La présence du fondamentalisme islamique au sein du régime n’a jamais empêché les Occidentaux de mettre l’Arabie saoudite au centre de toutes ses stratégies d’alliance au Moyen-Orient. Les liens entre les dirigeants du royaume et les puissances occidentales se développent d’abord pour affronter un ennemi commun : Nasser, le président égyptien. En pleine guerre froide, celui qui est à la tête du plus peuplé des pays arabes est devenu l’ennemi de l’Occident et une menace aux yeux de Riyad. Pour contrer le panarabisme du raïs égyptien, qui ambitionne d’unir tous les Arabes de la région, l’Arabie saoudite voit plus grand et prône un panislamisme à même d’unir tous les musulmans. La rencontre des wahhabites saoudiens et des Frères musulmans égyptiens donnera naissance à un mouvement puissant qui bouleversera profondément la société du royaume sunnite. Des musulmans du monde entier rejoignent les universités saoudiennes, des centaines d’organisations caritatives essaiment dans le Proche-Orient, des écoles coraniques et des mosquées commencent à apparaître sur tous les continents…

Le 11 septembre 2001, un tournant

L’Arabie saoudite devient une puissance politique de premier plan, capable de lever un embargo contre les États-Unis en 1973 lorsque ceux-ci soutiennent Israël ; de défier l’Iran lorsque le royaume s’inquiète des velléités hégémoniques du puissant rival chiite, à l’arrivée au pouvoir de l’ayatollah Khomeyni en 1979. Ou de créer une fracture profonde au sein du monde musulman au moment de la première guerre du Golfe, en 1991, en accueillant des bases américaines sur son sol. Les prêcheurs saoudiens envahissent les ondes de la planète, leur version de l’islam gagne du terrain. Mais les attaques du 11 septembre 2001 vont marquer un tournant. Alors que quinze des dix-neuf auteurs des attentats sont originaires du royaume, le monde découvre le redoutable système de prosélytisme saoudien et les moyens considérables qu’il a injectés pour promouvoir le wahhabisme. Si l’Arabie saoudite se défend d’avoir participé d’une quelconque manière aux attaques contre les États-Unis et, plus récemment, contre la France et la Belgique, elle n’en a pas moins participé à l’expansion de l’islamisme radical.

Surenchère radicale

Les dirigeants saoudiens sont pointés du doigt. Le régime prend conscience qu’alimenter le djihadisme peut causer sa perte, car il n’a désormais plus le monopole du discours radical. Après Al-Qaida, c’est au tour de l’organisation État islamique de se revendiquer du salafisme — or les Saoud sont les ennemis des premiers comme des seconds. Le royaume fait le grand écart. Alors que les oulémas émettent des fatwas condamnant le terrorisme et que le pouvoir participe à la lutte contre Daech en Syrie, la famille royale ne peut se détourner d’une ligne religieuse dure qui, depuis la création de l’État saoudien, protège l’intégrité de son régime. À l’intérieur de ses frontières, la surenchère radicale se poursuit tandis que l’Arabie saoudite est en passe de devenir un pays presque comme les autres depuis l’effondrement des prix du brut. À l’heure où les États-Unis se rapprochent doucement mais sûrement de l’ennemi juré iranien et que son alliance avec les Américains s’étiole, l’État bédouin se tourne vers d’autres partenaires. Toujours considérée avec bienveillance par Ryiad, la France se retrouve en première ligne. Et accepte, au nom de la « diplomatie économique », de devenir l’allié stratégique numéro un du pays de l’or noir…

Jean-François Parouty

ARABIE SAOUDITE, LES LIAISONS DANGEREUSES

Documentaire

Durée 70 min

Auteure Julie Lerat

Réalisation Claude Trinquesse

Production Yami 2, avec la participation de France Télévisions

Année 2016

 

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