L’Océanie, paradis sur Terre. Mais, sous le soleil et les cocotiers, la vahine a aujourd’hui bien changé… L'obésité est partout, ou presque, dans les îles du Pacifique.
Au top 10 des pays les plus touchés par cette maladie dans le monde, 9 sont des petits états insulaires du Pacifique. Histoire, culture, environnement alimentaire sont autant de facteurs qui ont, sans doute, contribué à rendre ces populations en surpoids. Loin d’être un problème individuel, l’Océanie doit à présent faire face à ce phénomène de masse, aux retombées économiques et sociales lourdes de conséquences. Sommes-nous face à notre déclin ou à l’aube d’un grand changement essentiel ?
En suivant Loïc et Rémy en Nouvelle-Calédonie, Adrienne et Camélia en Polynésie française ou le pasteur Ma’afu à Tonga, le film « La montée des gros » alerte sur le sujet et tente de comprendre pourquoi le physique des Océaniens a si brutalement changé.
Documentaire. 52 min
Réalisé par Denis Pinson et Laurent Jacquemin
Auteurs : Nathalie Darricau et Catherine Marconnet
Produit par Archipel Production et Canal +, en partenariat avec Polynésie 1ère
2016
PATITIFA
Les documentaires diffusés dans la collection "Patitifa" sont inédits et explorent la face cachée de l’Océanie.
Émission en langue française
Périodicité : toutes les 5 semaines. 60 min. Le lundi à 19h25
Présentation : Matéo
Interview des réalisateurs, Denis Pinson et Laurent Jacquemin
Pourquoi avoir choisi le thème de l’obésité ?
Laurent Jacquemin et Denis Pinson : Le choix du sujet s'est presque imposé à la suite de diverses rencontres, d'un forum sur l'alimentation dans le Pacifique, et d’un échange avec les auteurs lors d’un tournage à Nouméa. Pourquoi avions-nous, en Océanie, le record du monde de l'obésité ? Deux ans plus tard, après avoir tourné en Polynésie, en Nouvelle-Calédonie et à Tonga, nous espérons apporter un regard nouveau sur le sujet.
En quoi ce sujet vous touche-t-il personnellement ?
Laurent Jacquemin : Ce n’est pas tellement une question d’être touché mais de temps en temps, c’est bien de pouvoir se dire que les films peuvent, eux, toucher les gens. Ce sujet nous paraît tellement important dans notre société et pourtant si peu abordé que nous nous sommes demandés s’il n’était pas un peu tabou. Nous avons donc voulu interpeller les gens en leur rappelant qu’il s’agit d’un sujet grave, c’est en l’exposant au plus grand nombre que l’on pourra peut-être faire réagir.
Denis Pinson : Je suis né à Tahiti et j'ai toujours vécu au milieu de gens obèses. C’était presque devenu quelque chose d'anodin à mes yeux. En rencontrant nos personnages, je n'arrivais pas avec le même regard que quelqu'un de métropole ou d’Europe par exemple. J'ai abordé chacun d’entre eux avec beaucoup d'empathie, ce qui j’espère se ressent dans le film.
Qu'avez-vous découvert en le réalisant ?
Laurent Jacquemin : Quel que soit l’angle par lequel on aborde le problème de l’obésité, on est très vite dépassé. Certaines personnes ont même du mal à l’appeler « maladie ». Aujourd’hui, on a l’impression que chaque obèse a sa propre histoire, et probablement son propre traitement : certains vont avoir recours à une intervention chirurgicale, d’autres vont s’en sortir grâce à la volonté, au sport ou à un régime, d’autres estiment pouvoir bien vivre obèse. En Océanie, l’obésité est devenue un problème incontournable de santé publique, voire un problème de société…
Denis Pinson : Je n'imaginais pas que l'obésité pouvait être causée par autant de facteurs différents : psychologique, économique, social, historique, culturel, etc. Nous avons eu la chance de rencontrer beaucoup de spécialistes qui nous ont aidés à mieux cerner cette maladie. Et au final, le film ne donne pas la solution mais montre bien que c'est en avançant tous ensemble dans la même direction que la transition se fera.
Qu'est-ce qui vous a le plus marqué ?
Laurent Jacquemin : La ténacité de certains médecins (comme les Drs. Boissin ou Biarez) qui sont sur le terrain depuis des décennies et qui, malgré la progression de l’obésité, n’abdiquent pas. Ils continuent coûte que coûte d’aller voir la population, les autorités, de chercher, de tester… Ils se battent contre un puissant ennemi invisible qu’ils ne comprennent pas encore complètement, leur engagement et leur optimisme sont remarquables.
Denis Pinson : La volonté de Camélia. Nous l'avons suivie pendant plusieurs semaines et j'ai vraiment été impressionné de voir comment elle avait réussi à perdre autant de poids, et cela sans (presque) jamais lâcher prise. C'est un bel exemple à suivre.
Une anecdote de tournage ?
Laurent Jacquemin : Nous avons passé tout un week-end dans la famille de Rémy, qui nous a chaleureusement accueillis. Dans sa tribu, nous avons assisté à une réunion de pasteurs. La plupart d’entre eux étaient eux-mêmes en surpoids ou diabétiques mais commençaient à sensibiliser la population au sujet des dangers de l’obésité. Rémy nous racontait également qu’aujourd’hui, lors des cérémonies coutumières, chacun emmenait tellement de nourriture qu’on pourrait sans doute ouvrir un magasin avec tout ce qu’il y avait là à manger !
Denis Pinson : A Tonga, nous avons interviewé une personne qui n’était pas la bonne : un pasteur au lieu d’un docteur ! Nous avons vite compris le malentendu et, sans se décourager, nous avons filé vers le dispensaire du « vrai » médecin à une quinzaine de kilomètres, qui a eu la gentillesse de nous attendre.
les personnages
Loïc, personnage du film, Nouvelle-Calédonie
Philippe Dunoyer, président de la Commission permanente de la santé en Nouvelle-Calédonie
Pourquoi avez-vous accepté de participer au film ?
Loïc : Je voulais montrer aux gens que la sleeve n’est pas une opération à prendre à la légère. C’est un véritable travail sur soi, avec tout un encadrement autour, bien sûr.. Ça n’est pas si simple !
Philippe Dunoyer : Parce qu'il aborde un des plus graves problèmes de société face auquel nous ne pouvons pas rester spectateurs. L'angle choisi pour l'illustrer m'a semblé le plus efficace afin de toucher les consciences.
Quel serait votre message pour lutter contre l’obésité ?
Loïc : Il ne faut pas prendre son surpoids pour un jeu, il faut régler ce problème avant d’en arriver à la sleeve qui est une opération de la dernière chance. Il faut se motiver et prendre tous les moyens dont on dispose avant de se faire sleever.
Philippe Dunoyer : Le surpoids est l'antichambre de l'obésité : il n'est ni normal ni une fatalité. Faire attention à son poids, c'est défendre un capital.