La collection « Enquête d’art » présente le parcours singulier de deux chefs-d’œuvre du musée des Beaux-Arts de Bordeaux. « La Chasse aux lions » de Delacroix et « Tarquin et Lucrèce » de Titien sont ainsi révélés dans toute leur splendeur et leur passionnante histoire.
Le musée des Beaux-Arts, à Bordeaux, possède des collections exceptionnelles du XIXe siècle et, parmi elles, une œuvre monumentale d’Eugène Delacroix, La Chasse aux lions, commandée par l’État pour l’exposition universelle de 1855. « Elle a été réalisée par l’un des peintres les plus importants en France à cette époque. Nous sommes dans une bataille échevelée, effrénée, où des hommes sont déjà tombés au sol… les deux protagonistes principaux sont les fauves », explique la conservatrice Sandra Buratti-Hasan. Mais Delacroix ne s’intéresse pas à la pure figuration. « Ce qui prime, c’est la couleur, avec des turquoise presque systématiquement apposés à des rouges, des vermillons… ces juxtapositions de masses colorées existent par elles-mêmes. »
À déjà 57 ans, Eugène Delacroix (1798-1863), chef de file du romantisme en France, espère beaucoup de cette exposition, où il présente trente-cinq toiles. La Chasse aux lions, œuvre monumentale de 3,60 m x 1,75 m, crée la surprise. Charles Baudelaire et Théophile Gautier s’extasient, d’autres la rejettent pour sa composition illisible. Mais elle égale celles du grand maître du moment, Ingres. « Ils sont les grands tenants de la tradition picturale », souligne Dominique de Font-Réaulx, directrice du musée national Eugène-Delacroix.
La Chasse aux lions à Bordeaux
Après la manifestation parisienne, le tableau entre au musée de Bordeaux, installé alors dans l’hôtel de ville. Il y retrouve La Chasse aux lions du maître vénéré, Rubens. Pourquoi Bordeaux ? Sophie Barthélémy, directrice du musée des Beaux-Arts, explique que, dès l’âge de 5 ans, Delacroix connaissait les lieux, alors siège de la préfecture, son père ayant été nommé préfet de Gironde. Le petit Eugène avait donc la chance de gambader dans un salon au décor en trompe l’œil réalisé par Berinzago. La légende rapporte, par ailleurs, que c’est ici qu’il eut, très jeune, la révélation de sa vocation.
Mais ce chef-d’œuvre exceptionnel est aussi un « tableau miraculé », raconte la conservatrice. Les bords de la toile font, en effet, resurgir son histoire. En 1870, un incendie se déclare dans l’hôtel de ville. Une trentaine de peintures sont détruites, dont celle de Rubens ; le Delacroix est aux trois quarts brûlé et ne semble pas pouvoir être restauré… La Chasse aux lions, un temps abandonné, va renaître de ses cendres tel un phœnix ; un tiers de la toile a disparu à tout jamais. « Bien qu’amputé, tout fragment de Delacroix comporte la logique même de l’œuvre entière, il y a toute la palette et le génie du peintre, sa science des lignes, de la composition », déclare Stéphane Guégan, conservateur au département des peintures du musée d’Orsay. Les ravages du feu semblent en avoir renforcé l’aspect dramatique.
© Eclectic Production
Tarquin et Lucrèce, de Titien
Le second volet d’Enquête d’art relate l’histoire d’un chef-d’œuvre de Tiziano Vecellio, dit Titien, qui aurait pu rester dans l’ombre à jamais. Tarquin et Lucrèce « présente l’agression violente d’une femme par un homme armé… C’est une scène de viol », décrit Marc Favreau, conservateur en chef du patrimoine au musée des Beaux-Arts de Bordeaux. La toile a fait longtemps partie de la collection, mais, à la fin du XIXe siècle, on la relègue dans des réserves. Oubliée, remise en question par certains comme n’étant pas l’original, elle devient une œuvre suspecte. Des palais de Venise aux plus grands d’Europe, le tableau a pourtant traversé les mers, appartenu à différents prestigieux collectionneurs (Mazarin, Louis XIV…). Suscitant mille controverses, il faudra attendre 1964 pour que des experts viennent enfin réhabiliter le chef-d’œuvre et confirmer qu’il est bien de Titien. Pourquoi tant de méprises ? Quelle est l’histoire véritable de Lucrèce et de Tarquin ? Et celle du peintre ?
Françoise Jallot
Collection documentaire
Durée 2 x 26 min
Auteure Françoise Docquiert
Réalisation Laetitia Vans (La Chasse aux lions de Delacroix) / Raynald Mérienne (Tarquin et Lucrèce de Titien)
Production Eclectic Production / Anaprod, avec la participation de France Télévisions
Année 2016
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