ARKREOLOZIT
La mémoire retrouvée

Peintre de l’âme créole, artiste de la réalité populaire de la Réunion, Wilhiam ZITTE a été connu pour son concept « d’Art-Créologie » qui a cherché à mettre en exergue l’existence d’un Art Réunionnais. Au-delà d’une pratique académicienne, c’est dans des composants traditionnels, artisanaux, et ancestraux que le peintre et aussi sculpteur a tiré son inspiration. Il en est ressorti un travail artistique remarquable et engagé, témoin d’un attachement sans faille de son île.

Pour lui rendre hommage, c’est donc à la manière d’un « Photographe-Art-créologue » que le réalisateur Laurent ZITTE s’est plongé dans les ouvres de l’artiste peintre et sculpteur. Ainsi ce documentaire ART-KREOLOZIT explore les thèmes fondamentaux qu’a voulu mettre en lumière son homonyme Wilhiam ZITTE.

Des thèmes qui ont questionné l’esclavage, le marronnage, la langue et le statut identitaire du noir. De sa représentation injustement dissociée de la beauté que l’artiste a rétabli par un fort travail de portraits intitulé « TET KAF » qui a prôné fier et fort « KAF LÉ JOLI ».

NOTE D’INTENTION

Je n’avais pas vu ce Kaf qui était en moi. Lui l’a vu et a ouvert ce chemin d’Art-Créologie que j’ai pris. J’ai dû souvent répondre à cette question : Wilhiam Zitte est-il de ma famille ? Dans les échanges avec lui sur ce sujet, nous avions pu effectivement déterminer nos origines communes : la même souche, le même ancêtre. Cette esclave prénommée Zette, mère de deux enfants, qui fut affranchie en 1768 en prenant le nom définitif de Zitte.

En 1998, jeune étudiant à l’Ecole des Beaux-Arts de la Réunion, nous étions tous impressionnés par le geste artistique de cet artiste chargé de sens historique. Pour moi tout a commencé quand, dans l’édition de la Revue Noire sur le thème « Anthologie de la Photographie Africaine de l’Océan Indien et de la Diaspora » il avait révélé les photos anthropométriques de Désiré Charnay datées de 1863. Des hommes, des femmes et des enfants presque nus, dont certains étaient enchainés.

Avec ces images d’archives, il avait questionné « le modèle du Noir » en Art. En les mettant sur la place publique, il avait défendu leur dimension politique, questionné leur absence de visibilité et interrogé du coup l’hégémonie de l’imagerie coloniale.

Ces images avaient choqué et fait polémique à l’époque mais elles avaient surtout fait comprendre d’où provenaient la source et le sens de son travail artistique, notamment avec la série des portraits « Têt Kaf » sortit de tout un travail de fouilles sur notre histoire qu’il avait lui- même nommé « Art- Créologie ».

Par cette approche multidisciplinaire, entre histoire des Civilisations et histoire de l’Art il avait trouvé le motif, le canevas, le modèle de « son Noir ». Des portraits de Noirs rapidement devenus des icônes. Cette série faisant en deçà écho à Andy Warhol, ses peintures audacieuses avaient eu une audience grandissante et avaient impressionné de surcroit notre génération.