L’Assiette Gourm’hand, concours de cuisine international doté d’un jury prestigieux, est le seul au monde à s’adresser aux personnes porteuses d’un handicap mental. Pour Kenza, Zakaria et Gloria, derrière la préparation de leur plat, c’est autre chose qui se joue. Leur quête d’autonomie vis-à-vis de leurs proches et d’eux-mêmes, leur lutte pour qu'on les regarde enfin comme les citoyens qu’ils sont.
Kenza est la plus jeune de sa brigade, elle a 21 ans. Pendant le confinement, elle a découvert la cuisine et, depuis, cette activité est devenue une passion, « une vraie kiffance », comme elle dit. Elle a intégré en 2021 l’équipe de cuisine de l’ESAT Imprim Services à Lille. Par le biais du concours, Kenza va progressivement s’accepter elle-même et montrer à sa famille qu’elle peut se dépasser et les surprendre.
Chaque matin de la semaine, Zakaria, 25 ans, accompagné de sa mère, fait plus d’une heure de route pour aller au centre de formation de l’AMSAT (Association marocaine de Soutien et d’Aide aux personnes trisomiques), à Rabat. Après qu'on lui diagnostique une trisomie 21 à l'âge de 4 mois, sa mère a remué ciel et terre afin de trouver un établissement adapté pour l’accueillir dès sa petite enfance. Partir, voler de ses propres ailes, c’est ce que souhaite Zakaria au fond de lui. Sa mère, qui l’a toujours protégé, a peur de l’avenir. Son mari est décédé depuis trois ans, et elle se demande ce qu’il adviendra de son fils quand elle disparaîtra. Comment pourra-t-il se débrouiller financièrement s’il ne peut pas travailler ? À travers ce concours, Zakaria veut rassurer sa mère, lui prouver qu’il est capable de vivre sa vie, et de s’assumer loin d’elle et sans elle.
Gloria a 30 ans. Elle a tenté à plusieurs reprises de quitter le restaurant parisien La Table d’Émeraude, un ESAT (établissement spécialisé d’adaptation par le travail) dans lequel elle travaille depuis l’âge de 18 ans pour rejoindre différents restaurants. Mais personne n’a pris en compte son handicap. Pourtant, c’est une cuisinière de très haut niveau, malgré ses problèmes cognitifs dus à son hydrocéphalie. Aujourd’hui, bien qu’elle soit complètement autonome et vive seule dans un foyer, la jeune femme souffre de la stigmatisation, et se sent limitée dans son métier par son statut de personne porteuse d'un handicap.
Le concours de l’Assiette Gourm’hand
Créé il y a bientôt 20 ans par le chef Benoît Flahaut, il a pour but de valoriser le travail de cuisiniers porteurs d’un handicap mental. Seize équipes venues de France mais aussi d’Italie, de Suisse, de Belgique, du Maroc, d’Algérie et de Belgique étaient présentes cette année. Le concours bénéficie du soutien de l'ensemble des grandes associations culinaires et gastronomiques françaises et rassemble chaque année plus de 30 meilleurs ouvriers de France et grands chefs cuisiniers, venus déguster et juger les plats.
Note d’intention de Marie-Pierre Jaury
Si le concours est au cœur de la dramaturgie du film, si la cuisine favorise la création d’un lien avec le spectateur, mon objectif était en premier lieu de donner la parole à des personnes à qui on ne la donne quasiment jamais. Je souhaitais parler du handicap mental autrement que dans la pathologie et les déficiences, ne plus donner la parole à des spécialistes ou médecins, mais découvrir des personnes, dans leur singularité, à travers la préparation d’un plat, les suivre tout au long des étapes de la compétition avec leurs espoirs ou leurs doutes.
Dans cette compétition hors norme, le dépassement de soi, la lutte pour l’excellence et la détermination sont des enjeux d’autant plus forts et vitaux que la place de ces jeunes dans la société est loin d’être acquise. Depuis leur plus jeune âge, ils se sont retrouvés en marge du système scolaire, donc à terme du monde professionnel. Par ricochet, leur place dans la société est également marginalisée.
Kenza, Gloria, Zakaria – nos personnages – savent cuisiner. Ils sont qualifiés voire très expérimentés, mais ils doivent bénéficier d’un environnement adapté et bienveillant. Il ne s’agit pas là d’observer une compétition épisodique entre apprentis cuisiniers qui se transforment en chefs étoilés en quelques semaines, mais d’observer la progression de femmes et d’hommes pour qui l’exercice relève d’un effort supplémentaire, celui de composer avec leur handicap. Notre attachement aux personnages, notre passion devant leur surpassement face à des épreuves toujours plus compliquées est sensiblement le même que pour n’importe quel candidat, et permet ainsi de mieux s’attacher à partager leur expérience et leur combat pour la reconnaissance.
Ce documentaire sera suivi d'un débat présenté par Marie Drucker avec
Jean-Christophe Combe : ministre des Solidarités, de l'Autonomie et des Personnes handicapées
Yann Bucaille-Lanrezac : entrepreneur et fondateur de « Café joyeux »
Présentation
Marie Drucker
52 min
Inédit
Écriture et réalisation
Marie-Pierre Jaury
Productrice
Anne Labro
Production
Tangerine Productions
Avec la participation de
France Télévisions
Unité documentaire
Catherine Alvaresse
Renaud Allilaire
Sophie Chegaray
Julie de Mareuil
Documentaire disponible en visionnage sur
france.tvpreview
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