Je vais tuer Hitler
Un jour, à Savigny, un garçon de 18 ans est parti de sa maison en pleine guerre, en disant : « Je pars, je vais tuer Hitler. » Il s’appelait Joseph, il était juif, c’était mon grand-oncle. Il a disparu dans la nuit de l’Occupation, et son existence est devenue un secret de famille. Il a disparu de l’histoire, la petite comme la grande : il ne se trouve sur aucune liste de déportation, et la seule archive où il apparaisse est une photo de famille où il était enfant. Il a disparu comme une pierre au fond de l’eau, au lieu de partir en fumée dans le ciel de Pologne. Qu’est-il devenu ? Et pourquoi plus personne n’a mentionné son nom ?
Note d'intention
Avec ce film, je veux tenter de faire ressusciter un mort qui n’a pas de tombe, et même pas d’existence, dont personne ne se souvient. Au moins, redonner un nom, un visage, une place, une histoire. Retrouver les noms des morts et les nommer.
Je voudrais, à travers l’histoire de Joseph, donner à penser ce « présent éternel de la terreur ». Un film qui donne à sentir comment « ça » a existé, comment cela continue de résonner, à chaque génération, mais d’une façon différente.
Ce qui m’a donné le courage de travailler cette matière noire, c’est l’entreprise insensée de Joseph, qui le fait émerger du tableau historique général et qui le rend visible, parce qu’elle rappelle qu’il a été un être vivant, mû par le désir de vivre malgré l’abîme. Je repense à cette phrase de l’écrivain Isaac Bashevis Singer, à propos de ses personnages dans la Pologne des années trente : « Chacun de nous mourra avec la même passion qu’il a mis à vivre. »
Je n’enfreins pas sans effort cette injonction au silence dans laquelle j’ai été élevée. Mais je suis convaincue à présent qu’accepter le silence, c'est permettre l’ultime prolongement de l’entreprise d’anéantissement. Et que se retourner sur ce passé est peut-être un moyen de faire revivre les morts sans attendre l’arrivée du Messie, et de permettre aux vivants de vivre leur vie sans porter en eux les fantômes du passé.
Retrouver la trace de l’oncle Joseph parti tuer Hitler, c’est partir à mon tour, armée d’une caméra, tuer ce qui nous menace, l’oubli. C’est regarder ces gens tels qu’ils ont été, dans toute leur singularité, avec leurs travers et leurs qualités. C’est tenter de garder une trace de ce qui a été, de ceux qui ont été. Joseph était un parmi eux, un parmi les miens, un parmi l’humanité.
Suivi de
Ultras
« On a vécu comme ça, pendant plusieurs années, shootés au club. Être ultra, c’est pas que le foot en fait, c’est surtout une culture. Ce que les gens savent pas, c’est qu’on n’est pas juste des supporters, pas des hooligans. Regarder le match, c’est pas l’enjeu.
On est comme les piliers de l’institution d’une certaine manière, on tient les murs. On est là pour faire vivre les tribunes, pour se casser la voix, se faire bousculer. On est entre nous, et c’est ça qui nous plaît. Entre frères quelque part, à la vie, à la mort, défendre le club, la ville, en toute circonstance. »
Le film Ultras est une plongée dans le monde des tribunes, il est construit à partir d'entretiens avec des ultras pour qui l'engagement revêt une dimension sociale et politique.
Documentaire • 46 min • Auteur-réalisateur Maxence Voiseux • Production La Générale de Production • Avec la participation de France 3 Auvergne-Rhône-Alpes
L'HEURE D
Une collection de
14 documentaires inédits
diffusés tout l'été sur France 3
Documentaire inédit
Je vais tuer Hitler
51 min
Réalisation
Pauline Horovitz
Production
Squawk Production
Avec la participation de
France 3 Nouvelle-Aquitaine
Unité documentaire France Télévisions
Catherine Alvaresse
Antonio Grigolini
Renaud Allilaire
Julie de Mareuil