Remember My Name

L'heure D
Mercredi 30 août à 23.20

Après avoir franchi illégalement la frontière espagnole à Melilla depuis le Maroc, Ihsen entre dans le centre d'accueil pour mineures non accompagnées, où vivent également Asia et Mounia. Hamza, lui, a 18 ans et doit quitter le centre pour garçons. 

Arrivés seuls à Melilla, ces adolescent.e.s ont trouvé une nouvelle famille : le groupe de danse NANA. Après des mois de travail acharné, la troupe est sélectionnée pour participer au concours Incroyables Talents à Madrid. 

Mais, de retour à Melilla, loin des projecteurs, le rêve télévisuel s'évanouit d'un seul coup. La vie doit continuer comme avant.

Note d'intention

En 2018, on m’a demandé de réaliser un clip vidéo pour la chanson Niño, qui parle des enfants migrants fuyant leur pays d’origine à la recherche d’une nouvelle vie.

Nous avons décidé de le tourner dans un style documentaire et de situer l’histoire à Melilla, la ville frontière entre le Maroc et l’Espagne qui possède une clôture de barbelés très célèbre. J’ai découvert que le principal moyen par lequel les enfants immigrés entrent à Melilla ne se fait pas en sautant illégalement par-dessus cette clôture. La plupart d’entre eux entrent avec leur famille par la frontière officielle. Mais leurs familles retournent ensuite au Maroc, les laissant seuls à Melilla avec la mission de demander l’asile, qui leur permet d’être transférés dans un centre d’accueil. Ils espèrent obtenir alors un statut légal espagnol qui leur permettra d’entrer en Europe.

Nous avons pris contact avec Daniel Ventura, le ministre de l’Aide sociale de la ville autonome de Melilla. Nous avons obtenu son autorisation de filmer, et il nous a conseillé de rencontrer Natalia Díaz, cofondatrice et directrice de l’association Nana.

Natalia Díaz, docteure en éducation musicale et artiste sociale, a fondé cette association il y a cinq ans avec Navid Mohamed, danseur de break dance. Tous deux tentent d’accompagner et de soutenir le développement émotionnel des garçons et des filles des centres pour mineurs de Melilla par la danse et l’expression corporelle. L’association est un espace où les enfants peuvent être eux-mêmes et rêver d’un avenir différent, en oubliant un instant la mission qui leur est imposée. Ils peuvent y vivre pleinement leur adolescence dans tout ce qu’il y a de pire et de meilleur.

Quand j’ai proposé à Natalia de collaborer à notre clip vidéo, elle a tout de suite accepté. Les garçons étaient incroyablement à l’aise devant la caméra et une relation de confiance s’est très vite établie. J’ai été très impressionné par leurs histoires de famille : leurs mères, leurs frères et sœurs sont constamment présents dans leur vie, même s’ils ne les ont pas vus depuis des années. Les idées préconçues qu’ils portent sur leur avenir m’ont également surprise. Ainsi les filles pensaient qu’elles étaient destinées à travailler auprès des personnes âgées ou bien comme femmes de ménage. Mais, grâce au groupe de danse, elles se sont mises à rêver à ce qu’elles aimeraient réellement faire et devenir. De leur côté, les garçons ont commencé à remettre en question certaines idées toutes faites sur ce que l’on attend d’un homme marocain.

Au moment de les quitter, j’ai eu le sentiment que ce n’était pas la fin d’un projet, mais plutôt le début d’un autre, plus grand. Il fallait que je raconte leur histoire, que je leur donne une voix. J’ai commencé à suivre le groupe avec le soutien de Jessica Costilla, productrice du clip vidéo. En 2019, deux choses se sont produites qui m’ont d’avantage convaincue de la pertinence du projet : la montée du parti espagnol d’extrême droite Vox a intensifié le discours médiatique contre les enfants non accompagnés, connus sous le nom de Menas, et a placé cette question en une des journaux, polarisant la société et générant même de l’agressivité dans certains centres d’accueil pour mineurs, comme en Catalogne, à Séville ou à Hortaleza près de Madrid où une grenade a été lancée dans le centre.

Et puis, en juillet 2019, nous avons reçu une nouvelle inattendue : l’association avait été sélectionnée pour participer à la populaire émission de télévision Got Talent 2019. C’était un virage très intéressant sur le plan narratif, puisque les enfants allaient se produire à la télévision. L’intention affichée était de leur donner une voix et de briser le stigmate de (12) l’acronyme Menas. Mais cette sélection n’était pas dénuée d’opportunisme et elle faisait planer le doute d’une possible manipulation à des fins d’audience.

La participation à Got Talent ne change pas le projet initial : un flm sur le passage à l’âge adulte, dans lequel la danse nous permet de nous approcher de ces enfants et adolescents et de vivre au plus près leur transformation physique et psychologique. Mais il montre aussi la réalité de la société du spectacle et met ces garçons et ces filles face au mirage des attentes qui les ont poussés à aller à Melilla. Ce rêve de devenir des footballeurs célèbres, ce fantasme de la célébrité et de la télévision n’ont pas grand-chose à voir avec leur réalité et n’est qu’une bulle de quelques heures, avant le retour à leur vie dans le centre de d’hébergement.

Je crois profondément qu’il est nécessaire de faire un film pour changer le récit qui s’est construit sur les mineurs non accompagnés. Remember My Name est l’occasion pour le public de comprendre ces garçons et ces filles, de leur donner un nom et un prénom, d’oublier qu’ils sont des Menas et de développer une empathie à leur égard.

Se rapprocher de Hamza, Mouad et Asia signifie rire, souffrir, pleurer et grandir avec eux. C’est être à leurs côtés dans leur lutte pour améliorer leur quotidien, comprendre leur solitude et le rêve constant de retourner dans une famille qu’ils ne voient jamais mais qui est toujours présente dans leur esprit et à laquelle ils aspirent désespérément. Connaître ces enfants, c’est aussi reconnaître qu’ils ne sont pas coupables. Ce ne sont pas eux le problème, mais plutôt le système qui autorise ces dynamiques de chaque côté d’une barrière qui cherche à séparer l’Afrique de l’Europe.

L'heure D

Documentaire inédit

Une collection de
14 documentaires inédits
diffusés tout l'été sur France 3

Documentaire inédit
Remember My Name

80 min

Réalisation 
Elena Molina

Production
Boogaloo Films
Les Films d’Ici
Implicate S.coop.mad.

Avec la participation de
France 3 Corse

Unité documentaire France Télévisions 
Catherine Alvaresse
Antonio Grigolini
Renaud Allilaire
Julie de Mareuil

Disponible sur
 © france.tv

Sabine Lelièvre
Contact - France Télévisions
Laurence Guillopé
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