Tout pour Agnès

Entretien

Avec Vincent Garenq, Michèle Laroque et Yannick Choirat

France 2 diffusera, à partir du 8 janvier, une nouvelle série, Tout pour Agnès. La série sera également présente en intégralité sur france.tv.

Lors de la conférence de presse du jeudi 7 décembre, nous avons pu nous entretenir avec Vincent Garenq (VG), le réalisateur, et Michèle Laroque (ML) et Yannick Choirat (YC), interprétant respectivement Renée Le Roux et Maurice Agnelet.

  • Comment chacun d’entre vous s’est-il préparé pour son rôle ? Vous êtes-vous documenté sur l’affaire ?  

Yannick Choirat : Je connaissais très peu l’histoire. Ainsi, lorsque Vincent Garenq m’a proposé d’interpréter ce personnage, j’ai été séduit par l’idée de créer mon personnage en piochant dans différent matériaux : des documentaires, des livres et des images d’archives. J’ai notamment eu accès à 8 heures de rushs où Maurice Agnelet est interviewé par son fils. Je les ai toutes regardées pour essayer de comprendre la psychologie de cette personne. C’est un personnage retors dont je souhaitais aller chercher l’humanité. Cet homme n’était à priori pas un assassin de naissance. Dans ce type de rôle, on essaye de se mettre à la place du personnage, de comprendre ses mécanismes et pourquoi l’histoire s’est déroulée ainsi. Même s'il est condamné, on ne sait toujours pas s’il a vraiment tué Agnès. À la fin de cette histoire, où se niche sa culpabilité ? Ce sont tous ces éléments de sa personnalité que j’ai voulu jouer. 

Michèle Laroque : Je me suis préparée comme Yannick en me renseignant sur mon personnage sans pour autant être une copie conforme de Renée Le Roux. Il me semblait surtout important de raconter à travers elle une époque. C’est pour cela, par exemple, que j’ai tenté de reproduire la façon de parler des années 70 avec un phrasé plus lent et un placement de voix différent. Les costumes choisis étaient notamment d’époque. C’était assez amusant d’ailleurs, car dès que j’envoyais une photo d’une de mes robes à ma mère, elle me répondait : “Ah, j’ai eu la même !” 

  • Est-ce qu’on joue différemment lorsqu’une fiction est inspirée de faits réels ? Ressentez-vous une responsabilité particulière puisque vous incarnez des personnes qui ont existé ?  

ML : On aspire surtout à jouer le plus honnêtement possible. J’ai beaucoup aimé incarner un personnage qui a déjà existé. Cela nous permet de “boire un peu son identité”. Mais on la transforme, on agit comme un filtre. On ne devient pas Renée Le Roux ou Maurice Agnelet. On devient une Renée Le Roux ou un Maurice Agnelet. 

YC : En effet, on ne cherche pas à jouer la vérité mais une vérité. Avec ce type d’histoire, on s’attache à aller vers une universalité. Ce que je trouve intéressant dans ce travail, c’est que Maurice Agnelet est un personnage qui nous pousse à nous améliorer. C’est important à notre époque de montrer un homme aussi ambivalent, aussi pervers, qui peut être fourbe, qui peut être séduisant. On essaye de tendre un miroir et d’inciter les téléspectateurs à prendre du recul sur leur façon d’agir et à évoluer. 

Vincent Garenq : La responsabilité vis-à-vis d’une histoire vraie est aussi importante pour les acteurs que pour l’écriture du scénario. Même si le spectateur est averti qu’il s’agit d’une « fiction qui ne prétend à aucune exactitude factuelle », le spectateur reçoit cette histoire comme la vérité. Cela exige de notre part, les scénaristes, une grande honnêteté dans l’écriture.  

  • Comment procédez-vous donc pour adapter une histoire vraie à l’écran en cherchant à rester honnête ? 

VG : J’ai tout lu : tous les livres, tous les articles de presse, les dossiers d’instruction… J’écris toujours une série, ou un film, comme ça. J’essaie d’être le plus proche de la réalité et d’inventer le plus tard possible. Cependant la fiction nécessite des raccourcis. Par exemple, Agnès Le Roux avait deux sœurs. Mais dans notre série, il n’y en a qu’une. Cela n’avait aucun intérêt pour le scénario. Nous sommes obligés de faire des choix pour essayer de simplifier cette histoire. Nous avons quand même condensé plus de trente ans d’histoire en quatre épisodes. 

Par ailleurs, il y a une autre dimension dans l’écriture scénaristique ; nous n'avons pas vécu l’affaire Agnès Leroux. Et d’ailleurs personne ne peut prétendre avoir vécu l’entièreté de cette histoire et être capable de la raconter de manière objective. Mais nous avons tâché d’être, comme je l’ai déjà dit, le plus honnête possible et au plus proche de la réalité. 

  • Qu’est-ce qui vous a surpris quand vous avez découvert cette histoire ? 

YC : Le fait que Maurice Agnelet prenait note et enregistrait toutes ses conversations. Cela reflète à la fois quelque chose d’obsessionnel chez lui et une psyché particulière. De manière consciente ou inconsciente, il souhaite laisser une trace. Il signe quelque chose. Il signe une manière de faire et il signe une manière d’être. De plus, pour un avocat, le secret de l’instruction était tel qu’à cette époque il n’aurait jamais pu imaginer que son cabinet puisse être perquisitionné. Le film parle aussi de ça. D’une période où cet homme pensait bénéficier d’une impunité totale en raison de son métier mais aussi de son engagement au sein de la franc-maçonnerie, de la Ligue des droits de l’homme et d’une quinzaine d’autres associations.  

ML : Je me suis rendu compte que Renée Le Roux est vraiment une championne. C’est quelqu’un qui, dès son plus jeune âge, faisait les choses à fond. Lorsque son père lui demande de faire du violon, elle en fait douze heures par jour. C’est une femme de devoir et d’une grande pugnacité. Son sens du devoir qu’elle a vis-à-vis de son père s'est aussi renouvelé dans sa relation avec son mari. C’est pour cela qu’elle se bat autant pour son casino. Elle est dans le devoir avant d’être elle-même, avec sa sensibilité et son intelligence, lesquelles lui auraient permis de comprendre qui est Agnelet. Son sens du devoir s’avère finalement un handicap. J’ai aimé jouer cette faiblesse, venue de l’enfance et qui nourrira son sentiment de culpabilité. 

Propos recueillis par Clara Luc 

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