Sous la direction d’Isabelle Quillard, cheffe décoratrice, et de Marie Frémont, cheffe costumière, décors et costumes ont été pensés comme un dialogue constant. Un dialogue entre eux, pour qu’ils se répondent et épousent les personnages de la série, mais aussi un dialogue avec le scénario. « C’était vraiment la volonté de Vincent [Garenq] qu’il y ait un travail collaboratif entre les départements pour former une équipe », confie Marie Frémont.

Tout pour Agnès est une plongée dans le Nice des années 1970. Isabelle Quillard a fait un travail rigoureux de reconstitution de cette époque. « L’enjeu était de récréer avec subtilité cette atmosphère si particulière de la Côte d’Azur et de permettre aux décors de se fondre dans les personnages. L’appartement d’Agnès, la Villa Le Roux, la maison familiale des Agnelet… les décors devaient ressembler aux personnages, il fallait qu’ils s’y sentent bien pour que la magie opère. » Le plus grand défi a évidemment été le décor du Palais de la Méditerranée, clé de voûte de la série, lieu emblématique de l’Affaire Le Roux. Le travail de recherche d’archives a permis de réaliser une reconstitution de ce fascinant décor années 1930 à la mairie de Puteaux en région parisienne, et d’y recréer « un Palais à la hauteur de Renée Le Roux ».

Côté costumes, Marie Frémont souligne le défi de s’emparer de personnages qui ont réellement existé. « Ce n’était pas tant une reconstitution qu’une interprétation des archives dont nous disposions » pour les aider à correspondre aux rôles. « Pour les Le Roux en particulier, nous voulions retranscrire le côté très chic des années 1970, en nous inspirant notamment des silhouettes d’Yves Saint Laurent. » Tous les costumes, chinés avec soin, sont d’époque. « Nous avons travaillé par tableau : le mariage, le casino, la Villa Le Roux… chaque tableau a sa palette de couleurs ». Au début de la série, la palette de couleurs plus claire évoque Nice, la Côte d’Azur, puis les couleurs s’assombrissent progressivement au fil de l’intrigue et au fil du temps. « Le défi était aussi de faire voyager les personnages dans le temps. Les costumes sont autant de postures pour jouer le vieillissement. »

Le Palais de la Méditerranée, pur style Art déco construit dans les Années folles, trône aux numéros 13 et 15 de la promenade des Anglais. Avec son impressionnante façade, le Palais de la Méditerranée devient rapidement le fleuron des casinos français. Trois familles niçoises se partagent l’établissement, non sans rivalités. La famille Le Roux possède la moitié des parts. Au décès d’Henri Le Roux en 1967, Renée Le Roux, sa veuve, et ses quatre enfants héritent ensemble du Palais.

Dans le Nice corrompu et mafieux de Jacques Médecin, la guerre des tapis verts bat son plein. Jean-Dominique Fratoni, propriétaire du casino voisin Le Ruhl qui rêve de créer un « Las Vegas européen sur la Riviera », mène une guerre ouverte contre Renée Le Roux pour mettre la main sur son établissement. Après des années flamboyantes, le casino entame alors une lente agonie : ses actionnaires se déchirent et Renée Le Roux, intransigeante gestionnaire, refuse tout compromis et tient bon, au nom de l’héritage de son mari, œuvre d’une vie. 

C’est sa fille cadette, Agnès Le Roux, qui lui assène le coup de grâce. Vendant ses parts à Jean-Dominique Fratoni, elle précipite la chute du Palais de la Méditerranée.
Tombé aux mains de la concurrence qui a pour lui d’autres projets – le raser pour y construire un complexe immobilier –, le casino est mis en liquidation judiciaire en 1978, laissant sur le carreau plus de 300 salariés. Malgré leurs protestations et l’occupation des lieux, rien n’y fait. Le Palais de la Méditerranée, remplacé par un hôtel, est entièrement démoli, son décor et son mobilier vendus aux enchères. Seule sa façade classée a survécu au temps et se dresse toujours fièrement sur la promenade des Anglais, mémoire immuable de la ville et de son histoire.