Si l’on ne devait s’intéresser qu’au seul destin de ces deux frères – Jacques Vergès, l’avocat, et Paul Vergès, l’homme politique – en dehors de tout enjeu historique, il y aurait déjà quelque chose de fascinant.
Cette volonté insatiable d’assumer la violence des mots comme de l’action et de se retrouver au cœur des événements, comme s’engager pour la France libre à 17 ans pendant la Seconde Guerre mondiale, de n’en rater aucune miette, militer à travers le monde pour la décolonisation, de se confronter au danger, comme défendre les militants du FLN pendant la guerre d’Algérie, de mettre de côté la peur, prendre le maquis pour combattre le gaullisme tout-puissant, est centrale dans le destin des frères Vergès.
En matière de réécriture permanente de leur propre récit, Jacques et Paul Vergès ne sont pas les derniers. Mais ils ont tous deux quelque chose de particulier, que les autres n’ont pas, ce sont des convictions profondes – communiste pour Paul, libertaire pour Jacques. Ils ne sont jamais cyniques. Chambreurs, oui, cyniques, non.
En s’insérant, après le Seconde Guerre mondiale, dans le combat pour la décolonisation, avec des armes pour chacun différentes, ils ont construit un objectif commun : la ferme croyance que les peuples doivent prendre en main leur propre destin et se libérer du joug social, économique et culturel des puissances qui les ont oppressés au fil des siècles. Ce ne fut pas sans quelques compromissions, renoncements, erreurs ou théâtralisation excessive. Mais c’est le mélange de tout cela qui les rend tous deux attachants, voire fascinants.
Jacques fut un avocat exceptionnel et controversé, Paul une redoutable bête politique. Jacques avait le goût du luxe et de la provocation, Paul cultivait une certaine forme de sobriété dans l’existence. Jacques était animé par le mouvement et la réinvention permanente, Paul s’est patiemment construit un empire politique à La Réunion, la terre de leur enfance commune.
Contre l’avis majoritaire, les puissants et la doxa, Paul et Jacques ont défendu l’émancipation des damnés de la Terre, quitte parfois à s’affranchir d’« une certaine légalité », au nom de la cause. En pleine guerre froide, au cœur de la décolonisation de l’Empire français, l’homme politique et l’avocat ont incarné les convictions, les ambitions et les combats propres à toute une génération. Deux frères, deux styles qui ont chacun à leur manière marqué leur époque comme ils ont frappé les esprits de leurs contemporains.
Documentaire
52 min
Un film de
Gilles Cayate
Musique originale
Alim Isker
Conseiller historique
Gilles Gauvin
Production
13 Productions
Bis Repitita
Avec la participation de
France Télévisions
du Centre national du cinéma et de l’image animée
Avec le soutien de
la Région Réunion, de la Procirep et l’Angoa
2023
Unité documentaires
France Télévisions
Antonio Grigolini
Emmanuel Migeot
Louis Castro
À voir sur
francetv.preview