Porté par la voix de sa réalisatrice, fruit d’une rencontre entre deux femmes de quarante ans d’écart, Annie Ernaux, Je suis née quelque part dresse un portrait sensible de l’écrivaine – d’un bout à l’autre de son existence. Celui d’une femme aux yeux grands ouverts sur le temps qui passe et nous pétrit.
Femme devenue patrimoine de la littérature, seule écrivaine française consacrée par un prix Nobel, en 2022, elle a fait de sa vie le support de son œuvre depuis la parution de son premier roman en 1974...
Que raconter que ses livres n'ont pas dit ? À l'occasion de son grand retour dans sa ville natale en Normandie, alors qu'elle explore les lieux de sa prime enfance, l'icône de plusieurs générations revient sur sa jeunesse et ce qui a fait d’elle la femme et l’écrivaine engagée qu’elle est devenue. À travers un parcours géographique et narratif, celui de ses vingt-cinq premières années, qui ont résonné durant les soixante années suivantes, le film – le seul pour lequel elle a accepté de témoigner depuis le prix Nobel – propose un portrait « autrement » d'Annie Ernaux, où s'entremêlent ses souvenirs personnels, ses textes et l'histoire du XXe siècle.
Le documentaire se construit à partir des tournages auprès de l’autrice, qui constituent la colonne vertébrale du récit et autour desquels s’articulent les autres éléments qui le composent : une interview au long cours menée dans sa maison de Cergy, riche en confidences ; des extraits de ses textes lus par une jeune comédienne, en résonance avec son histoire ; des archives personnelles ou médiatiques, qui matérialisent sa mue et rappellent la constance de ses convictions, malgré parfois les critiques ; et des archives d’actualité racontant le siècle écoulé dont l’autrice est, d’hier à aujourd’hui, le produit autant que la conteuse.
Il s’achève loin de sa ville natale, lors d'un drôle d’événement parisien où l’on retrouve Annie Ernaux aux côtés de Michelle Perrot et Laure Adler : le Contre-Salon des Vieilles et des Vieux. Là ce n’est plus d’enfance mais de fin de vie qu’il est question. Car, à 80 ans passés, l’autrice pose encore et toujours les mots sur sa condition – d'une dame désormais âgée.