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Communiqué de presse
À partir du mercredi 26 février, Marie Portolano présentera la case « Infrarouge » et proposera des débats, après la diffusion de certains documentaires, avec des invités en plateau.
Synopsis
La Seine-Saint-Denis est le département le plus jeune et le plus pauvre de France métropolitaine. À Bobigny, le deuxième plus grand tribunal judiciaire de France traite plus de 150 000 crimes et délits chaque année. 11 % impliquent des mineurs, auteurs ou victimes. Pour y faire face, une Division Famille Jeunesse a été spécialement créée : la DIFAJE. Quinze procureurs s’y relaient jour et nuit.
Depuis le premier signalement jusqu’à l’audience, ces magistrats étudient les plaintes, dirigent les enquêtes et décident des suites pénales des affaires. Dans ce territoire tendu où chaque décision peut sceller des destins, le film Mineurs en peine est une immersion inédite dans la réalité crue de ce parquet hors norme. Manque de moyens, gravité des crimes, protection urgente des victimes, suivi pénal des délinquants : la caméra d’Emmanuel Guionet a capté pendant plusieurs mois le travail de ces procureurs, jeunes et engagés, défenseurs au quotidien de la loi, entre sanction et prévention.
Note d’intention d’Emmanuel Guionet, réalisateur
« Bobigny est la plus belle juridiction dans laquelle j’ai travaillé... C’est un poste complètement atypique, dans un département hors norme, un département-monde où se côtoient plus de 130 nationalités, où il y a toujours eu des moyens insuffisants, qui concentre tous les maux de la société, mais où vous vous sortez en tissant de très fortes solidarités avec les autres services de l’État, les autorités locales, les associations... »
Procureur général près la Cour de cassation
François Molins
En 2021, à l’occasion d’un documentaire dans lequel je suivais le quotidien d’un cabinet d’avocats, j’ai passé beaucoup de temps dans les tribunaux. Et c’est le tribunal de Bobigny qui m’a le plus marqué. Dès ma première visite dans ce palais années 70, planté au milieu des tours, j’ai été frappé par le brassage culturel et social. Dans les courants d’air des couloirs d’un bâtiment vieillissant, on croise les mères et les grands-mères, poussettes à la main, qui patientent en distribuant le goûter à des enfants impatients. Avec son jardin d’hiver où rien ne pousse plus depuis longtemps, son parvis rafistolé aux dalles cassées, le tribunal affiche l’histoire d’un département en souffrance, dégradé.
Après avoir fini ce premier documentaire, je ne cessais de penser à ce lieu bouillonnant. J’ai demandé en 2022 au président du tribunal de Bobigny de passer plusieurs semaines de repérage au sein des différents services. J’ai ainsi pu observer le travail des magistrats, des fonctionnaires, des éducateurs et des services sociaux. Et de tous les services, c’est la division de la DIFAJE (Division de la Famille et de la Jeunesse) qui m’a le plus impressionné. Cette Division unique en France concentre toute la détresse d’un département.
Elle traite des rixes, des vols, des violences intrafamiliales, du harcèlement, du proxénétisme, des viols, de toutes les affaires impliquant un mineur, qu’il soit auteur ou victime. Les jeunes substituts de la DIFAJE mettent au jour des réseaux de traite des êtres humains, ils doivent débrouiller des situations complexes de mineurs non accompagnés, sortir de très jeunes filles de l’emprise de proxénètes (parfois eux-mêmes mineurs). Des affaires difficiles qui demandent des réponses adaptées.
La spécificité de ce service, c’est le travail de suivi éducatif, préventif. La priorité est d’empêcher ces mineurs de sombrer dans la boucle de la délinquance. Le problème, c’est, lorsque les béquilles font défaut, que les services surchargés ne peuvent absorber les jugements, que les éducateurs démissionnent, que les associations n’ont plus de places, que les prisons sont saturées, que les foyers sont surchargés, que les hôpitaux manquent de lits et de soignants. Lorsqu’il n’y a plus de solutions, que les procureurs n’ont plus de réponses à donner aux familles, aux enfants, les situations se grippent, deviennent insupportables. Tout se dégrade si vite.
Le travail des procureurs est subtil et délicat. Ils écoutent, cherchent à comprendre chaque situation avant de trancher. Et si la prise de décision va toujours dans l’intérêt de la société, ils se battent pour apporter des réponses judiciaires qui aident les auteurs à sortir du cercle vicieux dans lesquels ils sont depuis longtemps enfermés. Des auteurs qui sont eux-mêmes, on le sait, très souvent aussi des victimes. Concernant les violences sexuelles par exemple, la moitié des auteurs ont subi de ces violences. Comment arrêter cette spirale ?
Au tribunal de Bobigny, l’engagement des magistrats est exceptionnel. S’ils ont fait le choix d’intégrer ce tribunal, c’est parce qu’ils savent le rôle fondamental qu’ils y ont à jouer. Le film raconte la solidarité, l’humilité de ces personnes qui travaillent dans l’ombre pour une société plus équitable. À travers leurs yeux, c’est une prise de conscience des carences à tous les niveaux. C’est un concentré de tout ce que ces enfants vivent au quotidien. Un véritable poste d’observation sur cette jeunesse pour laquelle le terme de justice doit prendre tout son sens. C’est un métier stimulant, en charge d’enjeux fondamentaux et inhabituels, un métier qui colle au monde, un métier qui interroge. Ce film raconte sans détours, à travers le prisme de la justice, la réalité crue de ce territoire hors norme.
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Documentaire
Mineurs en peine
70 min
Un film écrit et réalisé par
Emmanuel Guionet
Produit par
Song Pham
Martin Laurent
Blandine Roussel
Emmanuel Guionet
Production
Temps noir / Oddity
Avec la participation de
France Télévisions
Unité documentaire de France Télévisions
Antonio Grigolini
Renaud Allilaire
Julie de Mareuil
À voir sur
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