
Communiqué de presse
Comment fabriquons-nous l’acier made in France ? Hugo Clément nous emmène au cœur de l’industrie lourde et nous révèle ses petits secrets. Que devient l’acier de nos voitures, de nos frigos, quand on a fini de les utiliser ? On pourrait le recycler, mais la plus grande partie est envoyée à l’étranger.
Édito de Hugo Clément, journaliste
L’acier, c’est notre fort en France. On entend parler depuis des années de la décarbonation d’ArcelorMittal sur ses sites industriels de Dunkerque et de Fos-sur-Mer. Le gouvernement était même prêt à investir 850 millions d’euros. Pourtant, on ne voit toujours rien venir. On a voulu savoir ce qu’il se passait. Nous avons découvert que ces deux principaux sites qui fabriquent de l’acier en France sont les deux plus grosses bombes carbone de notre pays. 25 % des émissions de gaz à effet de serre de l’industrie française, c’est uniquement la production d’acier, selon l’Ademe.
Pourquoi la production d’acier est-elle si polluante ? On s’est aperçu qu’on utilisait toujours énormément de charbon pour fabriquer de l’acier. C’est simple : deux tiers du charbon qu’on importe en France servent à faire de l’acier. Pourtant, on pourrait très bien s’en passer. Utiliser des fours électriques, qui n’ont pas besoin de brûler du charbon pour chauffer. J’en ai visité un à Valenciennes, c’est très impressionnant : le chaudron atteint 1700 degrés, l’acier en fusion ressemble à du magma, on entend des explosions… On se croirait en pleine éruption volcanique ! Et pourtant, ça produit très peu de rejets dans l’atmosphère. J’ai cherché à comprendre pourquoi on ne produit pas plus comme ça. Et pourquoi on ne réutilise pas systématiquement le vieil acier de nos appareils ? Nous avons suivi un vieux frigo repris par une grande enseigne et on a fini dans un port industriel… Où la ferraille est envoyée en Turquie ! La majorité de notre acier usagé est exportée. C’est un vrai gâchis : on continue à produire en France de l’acier avec du minerai de fer vierge, en utilisant des hauts fourneaux qui tournent au charbon, alors qu’on pourrait simplement recycler l’acier de nos objets du quotidien, de nos bâtiments… Pour produire de nouveaux équipements. C’est possible, et ça se fait déjà ! Nous avons découvert que les nouveaux rails de nos chemins de fer sont en fait de vieux rails de la SNCF, refondus pour faire de nouvelles voies.
Des séquences exceptionnelles
Notre vieille ferraille part… en Turquie !
Nous avons remonté la filière de la ferraille, notre acier usagé. En suivant les bateaux, nous sommes remontés jusqu’en Turquie ! Cette ferraille peut pourtant servir de matière première pour de l’acier recyclé. Mais au lieu d’être fondue chez nous, la majorité est exportée.
On a découvert un four électrique pour l’acier et c’est dingue
C’est ce qu’on appelle l’acier vert : de la ferraille refondue dans un four électrique pour créer de l’acier recyclé. C’est très impressionnant à voir : grâce à une réaction électrique particulière, l’acier en fusion boue, on dirait du magma ou un énorme feu d’artifice.
Hauts fourneaux : ArcelorMittal n’a toujours pas changé de technologie malgré les promesses d’aide de l’état… et s’explique
ArcelorMittal, c’est le principal producteur d'acier en France… Mais aussi l’une des entreprises qui émet le plus de gaz à effet de serre. Pour aider l’industriel à verdir ses activités, le gouvernement a proposé de financer 850 millions d’euros. Ça dure depuis des années et ce n’est toujours pas fait. Pourquoi ? La direction nous répond.
En France, on produit toujours de l’acier avec du charbon !
À Fos-sur-Mer, on ne peut pas les louper, ces immenses tas de charbon. Ils servent à fabriquer de l’acier et à faire tourner les hauts fourneaux, les gigantesques fours dans lesquels ont fait fondre le minerai de fer. Les deux tiers du charbon importés en France servent uniquement à la fabrication de l’acier… Alors qu’il est techniquement possible de s’en passer.
Au Brésil, l’accident d’une mine de fer a tué 272 personnes
C’est la face cachée de l’industrie : pour faire de l’acier, il faut extraire du minerai de fer. Au Brésil par exemple, une région est littéralement grignotée par les mines qui s’étendent en permanence. Des immenses bassins stockent les résidus de la mine et, régulièrement, ils s'effondrent ! Nous sommes allés à la rencontre des victimes dans la région la plus touchée.
On commence enfin à produire des rails avec des vieux rails recyclés !
Le vrai recyclage de l’acier, c’est possible ! Depuis quelques années, les nouveaux rails de la SNCF sont fabriqués grâce à de vieux chemins de fer qu’elle refond.
Des combattants
Bénédicte Kjaer Khalat
Bénédicte est en colère : elle nous explique qu’en France, l’économie du réemploi est financée par les constructeurs et les distributeurs… dont l’intérêt est de vendre du neuf ! Chez Zero Waste France, elle milite pour réduire le nombre d’appareils électroménagers neufs mis sur le marché.
Daniel Moutet
Ce Marseillais a passé sa carrière face à l’usine d’ArcelorMittal sur le port de Fos-sur-Mer, en tant que grutier au grand port maritime. Désormais à la retraite, Daniel a fondé une association de défense des riverains et porté plainte au pénal contre la multinationale, pour dénoncer la pollution du site industriel.
Antonio Claret Fernandes
Au Brésil, Antonio est un infatigable combattant contre les barrages de déchets miniers, inhérents à l’extraction intensive du minerai de fer. Après la catastrophe de Brumadinho (272 morts), il s’est installé à Congonhas, où un barrage menace directement plusieurs milliers d’habitants.

Présentation
Hugo Clément
Production
Winter Productions
Production
Régis Lamanna-Rodat
Hugo Clément
Rédaction en chef
Pierre Grange
Réalisation
Nicolas Bellemon
Unité documentaire
Antonio Grigolini
Amandine Picault
Benoît Raio de San Lazaro
À voir sur
francetv.preview
Les épisodes de Sur le front sont disponibles dans la collection france.tv nature