Jean est aveugle. Il a appris à vivre avec un sens en moins et à développer sa propre perception du monde à travers l’écoute, le touché, l’intuition, la vibration du cœur. Depuis 20 ans, il s’investit à l’association Valentin Haüy avec les malvoyants. Il enseigne le braille et apporte sa bonne humeur comme un éclat de lumière dans l’obscurité. Rencontre avec cet homme qui trace son chemin au bout de sa canne blanche.
Jean Rouiné : « La vie reste belle »
Comment êtes-vous devenu aveugle ?
J’ai eu un accident, en 2003, en faisant du débroussaillage dans mon jardin et une branche m’est rentrée dans l’oeil… le truc idiot. J’ai été évasané en Australie où j’ai subi une greffe de la cornée. Mais de retour en Nouvelle-Calédonie, après quelques temps, la greffe a lâché. Je croyais que c’était une coupure de courant mais en fait j’étais devenu complètement aveugle. Moi qui étais électricien avant, on peut dire que la vie a un certain sens de l’humour !
Comment se déroule votre vie depuis cet accident ?
C’est certain que ma vie a complètement été chamboulée. Avant j’étais toujours à droite et à gauche, jamais en place. Maintenant je suis plus calme, plus posé, plus réfléchi… et ce n’est pas plus mal finalement. Après l’hôpital à Nouméa, je suis passé dans plusieurs foyers avant de pouvoir être autonome. J’ai dû apprendre complètement à vivre différemment, à marcher avec une canne, à apprendre le braille. Cela n’a pas été simple tous les jours mais il a fallu accepter et s’adapter car la vie continue.
Vous êtes investi depuis presque 20 ans dans l’association Valentin Haüy avec les malvoyants.
C’est l’assistante sociale qui m’a conseillé l’association quand j’ai voulu apprendre le braille. J’y ai découvert une véritable famille et de nombreuses activités, comme la gym, l’aquagym, les sorties, les ateliers numériques, en plus d’y apprendre le braille. Depuis j’ai eu envie de redonner un peu de ce que j’ai appris en enseignant à mon tour le braille.
Que vous apporte le braille ?
Avoir accès à la lecture quand on est aveugle, c’est magique. Lire c’est s’ouvrir à d’autres mondes, c’est s’évader. C’est pourquoi j’ai eu envie de l’enseigner à mon tour.
Le mot de la fin ?
La vie nous apporte son lot d’épreuves. Nous n’avons pas d’autre choix que de les accepter, de chasser les pensées négatives, même si ce n’est pas facile tous les jours, et de ne conserver que le positif. La vie reste belle. Moi je m’occupe de mes plantes sur mon petit balcon, je vais à l’association, je vois mes amis… et je cherche toujours l’amour à 56 ans. Je jette mes lignes comme on dit chez moi à Maré.
Réalisation : Dominique Roberjot et Christine Della-Maggiora
Production : Latitude 21 Pacific
Durée : 26 minutes
Diffusion : le dimanche à 18h55
Saison 2 - Episode 9 : La vie de Jean