Mon père a travaillé comme « Chef de zone » à Moruroa dans les années 60 et 70.
Je lui rends visite à Rurutu, petite île perdue de Polynésie française où il s’est isolé, avec ma mère, ses chiens et ses souvenirs.
Je suis accompagné de mon fils Louis, 15 ans, qui découvre l’île de ses ancêtres, profite de l’exotisme sauvage de Rurutu et pêche tous les jours. Moi, je tente de faire parler papa sur ce passé atomique qui me questionne depuis l’adolescence.
Au départ, il y a une promesse. La promesse que j’ai faite à mon fils de l’emmener avant ses 18 ans en Polynésie Française, là où je suis né et où vivent encore mes parents. Un voyage pour qu’il découvre d’où vient un peu lui aussi. Mais il y a surtout, à l’origine, un regret ? Celui de ne pas savoir qui est vraiment mon père, ou plutôt l’impression qu’il me manque quelque chose de lui. Je sais qu’il a travaillé à Moruroa quand j’étais enfant mais je ne sais pas ce qu’il vivait exactement. Ni ce qu’il ressentait à l’époque et ce qu’il en pense aujourd’hui.
De ces deux injonctions personnelles et familiales est donc né le désir d’un film. Un film sur un père aventurier et un peu fou qui a quitté sa Bresse natale à 25 ans pour aller faire exploser des bombes atomiques au paradis, et sur un fils qui ne veut lus trop que je le prenne dans mes bras, et ne me dit, lui non plus, plus rien de ce qu’il est et veut. Un film sur les « secrets d’Etat » de mon père et la distance adolescente de mon fils. Avec moi, au milieu, qui cherche à les comprendre et à leur parler.
Un film sur un père qui se rapproche, se précise et se dévoile, de démystifie et s’incarne. Et sur un fils qui s’éloigne, m’échappe et disparaît de moi, inaccessible, de plus en plus étranger. Un film, bien sûr, sur l’héritage et la mémoire, la filiation et la transmission. Sur la reconstruction d’une famille, métisse et composite, faite d’identités disparates mais étrangement solidaires.
Production : A perte de Vue/ Filmin’Tahiti/France télévisions/Nouvelle-Calédonie La 1ère
Avec l’aide à l’écriture et à la production de la Région Bretagne. Avec le soutien du CNC et de la PROCIREP-ANGOA.
Réalisation et scénario: Paul Manate Raoux
Durée : 52 minutes