Les femmes avortées :
- Denise, née en 1933 (91 ans) dans le Morvan. Avorte de nombreuses fois durant sa vie conjugale. Entretien recueilli à Domont, Val d’Oise avec sa petite fille Suzanne.
"11 enfants, j'avais vu ce que c'était. Moi j'en voulais deux maximum"
- Marie-France, née en 1946 (78 ans). Avorte en 1967. Entretien recueilli à Villeneuve-sur-Lot, dans le Lot-et-Garonne.
"Être enceinte c'était mourir, c'était aller crever sous les ponts, un péché, le diable, l'horreur, l'enfer. J’étais une putain, la dernière des dernières qui ne méritait pas de vivre. C'était tellement impossible que je me serais sûrement suicidée."
- Huguette, née en 1939 (84 ans) au Mans, dans la Sarthe. Avorte en 1964 et en 1970.
Le médecin de l'hôpital me dit "Tu vas voir, salope, ton curetage, ce sera sans anesthésie" / "Mes collègues se sont cotisées pour payer mon avortement" / "Je ne voulais pas mourir sans avoir revu mes enfants"
- Anne, née en 1951 (73 ans) à Paris. Avorte en 1970. Entretien recueilli à Saint-Seurin-de-Prats, en Dordogne
"Pour mes parents, c'était la chose la plus horrible qui puisse leur arriver"
- Maguy, née en 1943 (80 ans) dans le Lot-Et-Garonne. Entretien recueilli à Bordeaux.
"Je ne pouvais pas envisager de dire à ma mère que j'étais enceinte"
"Il fallait que je me débarrasse de ce que j'avais en moi et qui allait décider pour moi de mon avenir"
"Je ne voulais pas obliger mon ami à devenir mon mari"
- Colette, née en Normandie en 1938 (85 ans), avorte en 1965 à Rennes. Entretien mené à Biscarosse (Les Landes).
"Quand, avec mes jumelles de 18 mois, j'ai découvert cette nouvelle grossesse, j'avais peur de mourir tellement j'étais fatiguée"
"Le médecin a arraché un papier de son bloc, y a inscrit sa plaque d'immatriculation et nous a dit : je serai à telle heure à la gare de Rennes"
"J'aurais pris tous les risques, j'aurais fait n'importe quoi"
- Christine (née en 1954, 70 ans) et Pierre (né en 1953, 71 ans) à Lille. Vivent ensemble l’avortement clandestin de Christine en 1972.
"Les voyages du MLAC ne coïncidaient pas avec les vacances scolaires"
"Je ne sais pas si j'aurais pu témoigner si ma mère était encore en vie"
"Une douleur si intense et inattendue, ça vous traumatise quelque part"
- Denise, née en 1937 (87 ans). Entretien mené à Cherbourg, avec sa petite-fille Tiffany (27 ans)
“C’est ton père qui, à 12 ans, m’a mise sur la piste d’un avortement en Angleterre”
- Yvelise, née en 1956 (68 ans) en Guadeloupe. Avorte en 1972 à Amsterdam grâce au MLAC. Entretien mené dans le 11eme arrondissement de Paris.
"Cette grossesse si je l'avais gardée, elle aurait entravé ma vie"
"Dans le car, les autres filles parlaient tout bas de la douleur que provoquait une interruption de grossesse"
- Patricia, née en 1948 (74 ans) avorte en 1974. Témoignage recueilli dans le Vaucluse
“J'ai découvert ce jour-là ce qu'on appelle aujourd'hui la sororité”
Les enfants
- Jocelyne, née en 1948 (76 ans). Fille d’une faiseuse d’ange dénoncée et emprisonnée. Témoignage recueilli à Rouen.
"A 14 ans, après l'avoir vue en prison, j'ai décidé d'arrêter l'école"
"Mon père n'est jamais allé voir ma mère en prison"
"La diseuse de bonne aventure pratique des avortements ! Pour les gens, ça paraissait évident !"
"Aujourd'hui, je sais que ma mère a aidé des tas de gens, un peu comme le curé du village !"
- Catherine, née en 1947 (77 ans). Avorte sa mère en 1965 à l’âge de 17 ans. Entretien réalisé à Binic (Côtes d’Armor)
"Ma mère, 42 ans, enceinte, s'avance vers ce balcon et menace de sauter."
"Ma mère m'a dit : “Avant c'est ta grand-mère qui me faisait ça, mais là, elle tremble, elle ne peut plus, il n’y a que toi"
Les aidant.es
- Françoise, née en 1948 (76 ans) à Chaucenne dans le Doubs. Devenue médecin et militante, elle pratiquera des avortements clandestins avant le passage de la Loi Veil. Entretien recueilli à Lons-Le-Saulnier.
"Si les femmes faisaient appel à nous, c'est qu'elles ne pouvaient pas faire autrement"
"Toutes les classes sociales venaient nous voir"
"Les RG nous suivaient et savaient très bien ce que nous faisions à l'arrière de la librairie"
- Olivier, né en 1948 (76 ans) à Versailles. Étudiant en médecine et importateur de la méthode Karman en France. Entretien réalisé à Rennes.
"A l'hôpital, face aux femmes avortées, j'ai été bouleversé par leur souffrance, leur mort mais aussi l'attitude du corps médical avec elles, de mépris, de jugement"
"A l'époque, les chirurgiens n'hésitaient pas à faire des curetages sans anesthésie pour que la leçon soit retenue"
- Michelle, née en 1952 à Angoulême (72 ans). Avorte en 1972 à Toulouse entre les mains d’un médecin libidineux. Entretien réalisé à Bordeaux.
“Quand il a terminé, il m’a fait asseoir sur ses genoux et m’a dit : “Ne recommence plus, ma petite”.
Les compagnons
- Antonio, né en 1939 à Madrid (85 ans). Perd dans un avortement clandestin Clotilde, sa femme, et la mère de ses deux enfants. Entretien réalisé à Rennes avec sa petite-fille Ana Girardot.
“Mais toi, tu n’as rien à te reprocher……Oui mais c’est elle qui est décédée, pas moi”
"Je lui ai dit : si tu y restes je me suicide. Elle m'a dit : “non, ne fais pas ça ! Pense aux filles"
"Pendant des semaines, je n'ai pas pu dire à mes filles que leur mère était morte"
Avec la participation exceptionnelle de…
- Annie Ernaux, prix Nobel de littérature 2022.
“La loi Veil est la loi la plus importante du 20eme siècle”
"J'ai appelé cet épisode l'événement parce qu'il y aura un avant et un après, les conséquences psychiques sont énormes"
- Christiane Taubira, ancienne Garde des sceaux
« Je me réveille un jour et j’apprends qu’on était persuadé que je ne survivrais pas ».
Durée
90 minutes
Réalisée par
Sonia Gonzalez
Auteurs
Sonia Gonzalez - Bibia Pavard
Avec la voix de
Ana Girardot
Coordination d’écriture
Cécile Coolen
Image
Katell Djian
Montage
Christine Marier
Compositeur
Olivier Militon
Produit par
Ina (Isabelle Foucrier)
Avec la participation de
France Télévisions
Unité documentaires société et géopolitique
Antonio Grigolini
Julie Grivaux
Emmanuel Migeot
Hélène Frandon
Louis Castro
À voir sur
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