Dossier de presse
Note d'intention de David Hourrègue, réalisateur
À ce jour, plus de 90% des fonds marins restent inexplorés. Les océans représentant 70% de la surface du globe, plus des deux tiers de notre planète nous sont donc encore totalement inconnus. Et là où la science s’arrête, la fiction s’engouffre souvent : 20 000 lieux sous les mers de Jules Verne, Abyss de James Cameron…
Les exemples d’illustres auteurs de science-fiction fascinés par les mystères des abîmes sont légion. Rivages baigne dans ces eaux là et plus encore. Fable écologique, thriller scientifique autant que réflexion sur le deuil, l’histoire de la série captive, fait réfléchir et, au bout du compte, émeut. Ce récit nous rappelle tant à notre peur de l’inconnu qu’à l’absolu nécessité de comprendre notre environnement pour mieux l’appréhender : j’y vois la promesse d’un programme différent, susceptible de conquérir un large public. Autant de raisons renforcées par un fort écho personnel qui font de cette série un beau défi que je me réjouis d’avoir à relever.
Une résonnance personnelle
Grâce à un père aventureux qui rêvait de parcourir le monde à bord d’un voilier, j’ai vécu une partie de mon enfance en famille sur les océans. J’ai notamment appris à nager en pleine mer et c’est lors d’une de ces sessions que je découvrais sous mes pieds la noirceur des profondeurs. Une fois revenu sur le ponton, ma peur laissa rapidement place à l’obsession. Je voulais désormais percer les secrets des abysses, faire toute la lumière sur l’existence des sirènes ou encore découvrir les restes de l’Atlantide. Rien que ça.
20 ans plus tard, une fois devenu réalisateur, j’embarquais pour une série sur l’ile de la Réunion où j’étais témoin du début de la crise du requin (La Réunion est sur les quinze dernières années, l’endroit du monde comptant le plus d’attaques mortelles de squales), dû en grande partie à la pêche intensive des thons au large et à l’installation d’une zone protégée entre les deux plus grandes plages de l’ile. J’ai vu les tensions s’exacerber au fil des années entre les industriels et les écologistes et j’ai vu ce territoire, autrefois paradisiaque, se scléroser. Beaucoup de ce qui compose Rivages s’est joué alors sous mes yeux. À commencer par ce sentiment d’impuissance de l’homme face à un milieu naturel menacé qui soudain réagit. Et toutes les mauvaises décisions souvent disproportionnées qui découlent de cette même incompréhension.
J’habite aujourd’hui en Normandie, en pleine nature. Je m’efforce de vivre au maximum en harmonie avec mon environnement et j’élève mes enfants dans ce souci constant. C’est armé de ces convictions et plein de ces souvenirs que je me suis appliqué à ancrer la série dans une réalité sociale, environnementale et régionale palpable pour mieux renforcer l’aspect émotionnel du récit. C’est sur ces bases-là, dans un cadre crédible pour le public, que l’aspect fantastique et spectaculaire peut prendre tout son envol.
Une approche technique ambitieuse au service de l’émotion
Avec son ambiance si particulière et sa variété de décors disponibles, Fécamp est apparue comme une alliée de taille. Le tournage, connecté aux éléments, s’est révélé complexe et très exigeant physiquement.
Ambitieuse visuellement, Rivages est avant tout une série de regards et de contrastes dans des atmosphères marquées, en tentant de coller au plus près des émotions de mes personnages tout en magnifiant les paysages de Fécamp, la force des éléments naturels et décupler les contrastes de tailles entre l’humain et l’environnement.
Un enjeu créatif fort a été la direction à trouver pour mettre en image cette créature inconnue. Elle a été la résultante de différentes techniques de SFX et VFX savamment mêlées. Cela a été menée en gardant en tête que : le plus on suggère la créature à défaut de la montrer, le plus on rendra ses apparitions mémorables.
Pour la musique, après Germinal, j’ai eu la joie de collaborer de nouveau avec Audrey Ismaël (Prix de la meilleure musique originale 2022 au Festival de la Rochelle pour Vortex) dont je connais tout le talent mélodique, le sens du romanesque et la sensibilité pour traduire l’ampleur de Rivages, dans ses moments les plus intimes, comme les plus extraordinaires.
Le monde regorge encore de trésors… qui ne demandent qu’à être découverts
Avec Rivages, j’avoue aussi une ambition secrète. Il y a peu, j’intervenais dans des collèges et lycées autour de Germinal et j’étais choqué par l’absence d’horizon ressenti par la jeunesse, cette impression partagée que le monde était fini et que plus rien d’inattendu ne pouvait survenir hormis des guerres ou pandémies. Je suis un enfant des années 1980. En tant que cinéphile, cela signifie que j’ai grandi dans une ère où Steven Spielberg réussissait à nous faire croire qu’un enfant pouvait cacher dans sa chambre un extraterrestre, recherché par la police et une armée de scientifiques. J’y ai cru de tout cœur et cela a impacté ma vie. J’ai beau avoir 35 années de plus que lorsque je découvrais E.T, j’aimerais que Rivages, à son niveau, puisse faire émerger chez son public, l’envie de croire que le monde ne s’arrête pas aux frontières délimitées par un smartphone et de savants algorithmes. Retrouver et défendre les idées même d’inconnu, de merveilleux et faire briller le regard de toute la famille devant l’écran, faire reculer de quelques pas le cynisme ambiant et amener un enfant à regarder la mer en se disant de nouveau « Et si ? » vaut tous les combats qui s’annoncent. Si la réussite est visée mais toujours incertaine, la superbe histoire que nous avons à raconter en sera le meilleur terreau.